A-t-on tendance à moins voir le bon côté de la médaille de la publicité ? La question se pose à cette époque où la pub s’immisce au quotidien dans notre téléphone. Dans ce monde qui va vite, vite, vite, la publicité se doit d’être originale, mais aussi authentique. Et ça, ça peut se faire en faisant rayonner la culture d’ici.
Toute la journée, vous avez été incapable de vous enlever une chanson de la tête. Sous la douche, en attendant votre moka frappé au café du coin, dans le métro, au boulot; bref elle joue en boucle entre vos deux oreilles ! Vous avez beau vous creuser les méninges, vous n’arrivez pas à vous souvenir du moment où vous avez entendu la pièce en question… Puis, en jasant avec des proches, vous finissez par faire le lien: c’est la toune qui joue dans cette pub que vous voyez partout ! C’est grâce à la publicité que vous venez de découvrir un petit bijou culturel bien de chez nous. «Quand on parle de culture québécoise qui est présente en publicité, on pense spontanément à la musique, mais ça peut aller plus loin que ça. Ça peut être des références à des émissions, à des films, à des grand·es artistes qui ont été important·es dans l’histoire du Québec, mentionne Marc Desnoyers, directeur du service-conseil chez Upperkut. Ça crée des référents et le référent, c’est très fort en publicité. C’est un tremplin ou quelque chose où tout le monde peut s’associer et comprendre de quoi on veut parler. En même temps, ça fait la promotion de la culture.
Il est vrai que la publicité elle-même peut être vue comme un véhicule culturel. Peu importe que ce véhicule emprunte l’autoroute ou un petit rang de campagne, il fait son chemin à son rythme dans l’écosystème publicitaire en devenant le vecteur de promotion d’une chanson, d’une image ou d’une approche artistique. «Quand on est capable d’intégrer des références culturelles dans des communications, ça permet de faire rayonner la culture canadienne et québécoise. Aussi, je pense que la publicité en soi est un moyen de façonner la culture. On peut y créer de nouvelles expressions, de nouveaux réflexes et devenir un nouveau repère», note Laurianne Normandin, directrice de stratégie chez Sid Lee. À titre d’exemple, la phrase: «Tu devrais t’acheter un 6/49!» a initialement été utilisée dans une pub, avant d’être lue sur les lèvres de tout le monde. Elle est carrément devenue une expression à part entière! «Je crois qu’on est capable de créer de la culture, avec la publicité», poursuit-elle.
Et qu’en est-il des entreprises publiques ou privées ? La publicité participe-t-elle de la même manière à leur bon rayonnement ? «Je pense que la publicité est un des éléments qui permet de faire rayonner les entreprises privées ou publiques. En général, je dirais même que c’est le premier élément ! Cependant, il faut que ce soit connecté avec une expérience 360 et un bon storytelling. La pub est un des premiers éléments qui va transmettre le storytelling de l’identité de marque et l’ADN d’une entreprise », ajoute Laurianne Normandin.
De bonnes valeurs modernes, mais authentiques
Abordant des sujets qui mènent à une réflexion et qui visent à faire évoluer les mentalités, la pub sociétale est très certainement un des pions importants de l’écosystème publicitaire. «En matière de sensibilisation et de changement de comportement, le marketing est probablement une des armes les plus puissantes dans l’arsenal des gouvernements – au niveau fédéral, provincial, municipal – mais aussi des OBNL. Ce qui est important dans le marketing sociétal, c’est de ne pas essayer de culpabiliser la clientèle pour l’amener à changer un comportement. On souhaite plutôt faire la promotion de valeurs. Non pas défendre ou interdire », explique Marc Desnoyers. Tant et aussi longtemps que c’est bien exécuté, la pub sociétale peut faire des gagnants sur toute la ligne ! «Quand c’est honnête et que c’est rattaché à du concret, je pense qu’il y a une plus-value pour tout le monde. Pour l’entreprise, en termes réputationnels et en termes de développement de marché auprès de certaines clientèles. Il y a un bénéfice net pour la société aussi», poursuit-il. Le directeur du conseil-service de l’agence Upperkut cite, en exemple, un de ses clients, Équiterre. «C’est certain qu’on fait du marketing sociétal avec Équiterre. On est en mode promotion des bonnes habitudes de vie et sensibilisation en lien avec la lutte au changement climatique. C’est un sujet qui fait consensus; personne n’est contre la vertu!»
Ouvrir la porte sur le monde de demain
Monsieur et madame-tout-le-monde n’a pas tendance à accorder le même intérêt à la publicité qu’aux films ou aux téléséries qu’il·elle choisit de regarder. Pourtant, la publicité a un pouvoir insoupçonné que certains autres projets créatifs ne possèdent pas. «Avec la publicité, je pense qu’on a une meilleure flexibilité en termes de contenu. Pour un mandat publicitaire, on est en mesure de créer des choses qui n’existent pas nécessairement, d’intégrer de nouveaux mouvements dans la société et d’inclure des valeurs écologiques, par exemple », soulève Laurianne Normandin.
«Quand on a un mandat publicitaire à faire, on est capable d’inclure et de promouvoir des innovations qui sont bonnes pour la société. De mettre en lumière des enjeux au cœur des problèmes à résoudre. Au-delà de ça, je pense que la pub a aussi la possibilité de transformer le monde de demain dans sa façon de réagir et de rebondir sur des événements de l’actualité », poursuit la directrice de stratégie de l’agence Sid Lee. Elle pense notamment à une des campagnes réalisées dans le cadre des élections présidentielles américaines.
La jeune génération ne vote pas assez. C’est un problème récurrent. Par le biais d’une expérience en ligne ajoutée au jeu vidéo Minecraft (en collaboration avec l’OBNL Rock the Vote), l’objectif était d’éduquer les futur·es et nouveau·elles électeur·trices sur le processus électoral, d’une manière créative et engagée.
Sur son erre d’aller
Justement, en parlant du monde de demain, à quoi peut-on s’attendre en matière de rayonnement de la culture en publicité, au cours des prochaines années ? La tendance actuelle poursuivra-t-elle sa lancée ? «L’authenticité, c’est important pour qu’un message soit bien reçu et véhiculé. Quand l’entreprise qui émet le message est authentique et est collée à ses valeurs naturelles, c’est là que ça va être bien perçu. Je crois que les marques réalisent de plus en plus que ça ne fonctionne pas de ne pas être authentiques. C’est presque la règle de base d’être vrai», rapporte Laurianne Normandin.
Même s’il dit ne pas posséder de boule de cristal, Marc Desnoyers abonde dans le même sens. «Les tendances démontrent que la génération Z est particulièrement attachée à la question des valeurs qu’on associe aux marques, aux produits, aux organisations, etc., auxquelles elle souhaite s’afficher ou s’associer. Même les entreprises qui ont des produits à vendre dans le secteur commercial vont vouloir s’associer à des causes, à une vision du monde, à certaines valeurs. Je ne pense pas que ça va reculer. Au contraire, ça va aller en augmentant.»
Et si on voyait un autre petit joueur se pointer le nez dans le milieu de la publicité et du marketing, à quoi pourrait-il ressembler ? «Je crois que ce qui est intéressant et qui a de plus en plus d’efficacité, c’est quand on est capable de non seulement avoir un message, mais de mettre de l’avant une initiative marketing créée de toutes pièces pour la communication. Pour moi, c’est ça qui a le plus de valeur et qui est ressenti comme étant le plus authentique par la population. C’est ce qui m’inspire le plus dans le marché actuel, au niveau de la pub. J’ose espérer que ça fasse partie du futur», conclut Laurianne Normandin.
Marc Desnoyers et Laurianne Normandin
