L’agence de production créative M&H a traversé cinq décennies, s’est questionnée, s’est transformée, mais n’a jamais perdu le cap. Bien au contraire. Embrassant avec optimisme les changements technologiques inhérents à chaque époque, l’entreprise spécialisée dans la production de contenu pour tous les canaux de communication a su se réinventer pour demeurer dans la course. Entretien avec Daniel Gendron, chef de la direction de M&H, qui nous révèle les quelques ingrédients clé pour concocter une recette de longévité.

En 1973, alors que le télécopieur et le support papier sont encore indispensables pour faire rouler rondement l’industrie, M&H voit le jour. À l’époque, l’agence de graphisme, qui transpire déjà l’avant-gardisme, est reconnue pour détenir le plus grand catalogue de fontes disponible à Montréal. «On était particulièrement apprécié par les créateurs, qui eux cherchaient toujours à innover, à moderniser leurs créations, à faire les choses différemment», explique Daniel Gendron.
Quelques années plus tard, la technique de photocomposition — un «procédé faisant appel à des systèmes photographiques pour la composition des textes», selon la définition du Larousse — connaît ses années de gloire. Les équipes de M&H l’utilisent et l’agence se fait peu à peu un nom dans son industrie, principalement auprès des agences de création anglophones «C’était assez rudimentaire comme procédé, si on compare avec ce qui se fait maintenant, mais c’était tout de même des techniciens hautement qualifiés qui faisaient ce travail», précise le chef de la direction, qui a débuté chez M&H en 1 981 au poste de technicien de chambre noire.
Au milieu des années 80, Peter Marsh, le président de l’époque, a flairé un essoufflement au niveau de l’adaptation publicitaire. Les annonceurs tournaient de plus en plus le dos aux agences anglophones pour faire affaire avec les entreprises de création francophones, afin de réaliser des campagnes locales qui s’adressaient plus spécifiquement aux Québécois·es. «M&H a pris ce virage, et j’ai fait partie de cette équipe-là avec mon associé de longue date Yves Langelier. L’agence devait avoir des visages «québécois» pour solliciter et démarcher les agences francophones de Montréal. Je dirais que cela a très bien fonctionné. M&H était crédible, innovatrice», précise Daniel Gendron.
Quelques dizaines d’années plus tard, l’agence de production créative de 160 employé·es est l’une des agences de production les plus respectées de son industrie, et détient des bureaux à Montréal et à Toronto. Elle couvre aujourd’hui beaucoup plus que la production graphique, numérique ou langagière : elle est devenue experte en gestion du processus de production créative, l’exploitation de la technologie marketing, et veille à la qualité du déploiement et l’expression d’une marque sur tous les canaux.
Le bureau de Toronto, créé il y a 7 ans, connaît aujourd’hui un déploiement important. L’arrivée de Dave Nourse, au poste de vice-président croissance, permettra à la succursale torontoise d’atteindre la même taille que celle de Montréal d’ici les 18 prochains mois.
Christian Quenneville, qui a rejoint l’équipe en mai 2021 à titre de président-directeur général, a également marqué un tournant dans la croissance de M&H. Il a réussi à amener l’organisation à un autre niveau grâce à une meilleure utilisation des outils marketing tech. Ce dernier a également solidifié la structure de l’entreprise appuyé d’une nouvelle équipe de direction, ce qui a permis une croissance de 65 % depuis 2 ans.
Christian Quenneville et Daniel Gendron | Photo : Donald Robitaille
Une agence toujours de son temps qui a tiré profit du changement
Au fil du temps, M&H a dû faire preuve de beaucoup de résilience pour s’assurer de rester compétitive et de combler les attentes des clients. Aux premières loges d’une industrie changeante, régulièrement chambardée par l’évolution technologique des procédés de création, l’entreprise n’a pourtant jamais eu peur d’emprunter des chemins inconnus, ce qui a contribué à sa longévité, explique Daniel Gendron. «Dans notre façon de voir les choses, dans notre ADN, c’était pour nous important de constamment innover, de comprendre les besoins de nos clients pour les conjuguer avec la réalité du moment. Comment peut-on modifier notre offre de services pour l’optimiser ? C’est une question qu’on se posait régulièrement et qu’on se posera toujours.»
C’est en partie ce réflexe d’adaptation continue qui a permis à M&H d’atteindre le succès qu’elle connaît aujourd’hui, ajoute le chef de la direction. «L’ensemble de mes compétiteurs de l’époque, maintenant, ils n’existent plus. On n’a jamais causé de révolution dans notre domaine, dans notre offre, mais on l’a surtout constamment affinée.»
Les marchés ont énormément bougé, les supports ont changé et les technologies se sont succédées, mais l’agence a su garder la tête froide pour sans cesse améliorer la profondeur des expertises nécessaires à la réalisation des mandats qu’on lui confiait. «On s’est toujours assuré d’utiliser 100 % des technologies disponibles pour gagner en efficacité, et de s’arrimer avec ceux de nos clients. Nous mettons constamment à jour nos outils numériques pour déployer efficacement les campagnes marketing de nos clients et leur donner une vision claire sur leur budget de production, explique Daniel Gendron. On devait être ingénieux, parce qu’en utilisant de nouveaux procédés, ça nous permettait de nous démarquer des autres. On aime aussi croire qu’on est un peu les précurseurs de l’impartition chez nos clients, qui était la bonne chose à faire à l’époque. Et aujourd’hui, on a gardé tous les avantages de proximité amenés par l’impartition qui a fait place à l’intégration, sans avoir le besoin d’être physiquement chez nos clients.»
Le travail et l’écoute, des ingrédients vedettes
Pour le chef de la direction, il n’y a pas réellement de recette miracle que les entreprises doivent suivre pour survivre au temps, aux défis, aux mutations du numérique ou à la compétition toujours plus féroce. Ce qui fait la différence, c’est simplement l’écoute de l’industrie, la qualité et l’expertise, le niveau de travail qu’on décide de mettre.
«Dans notre domaine, c’est comme si nous avions une position de col bleu dans l’industrie. On a toujours tenté de desservir nos clients — à une époque c’était des créatifs — en mettant les bouchées doubles pour les amener ailleurs, pour rehausser leurs produits. On a voulu entendre leurs demandes, pour toujours trouver la meilleure façon de faire, produire le meilleur contenu possible.»
Aujourd’hui, M&H ne dessert plus uniquement les agences de publicité et les créateurs, mais principalement les annonceurs. «On est aujourd’hui une alternative à ce désir d’internaliser les services. En voyant cette volonté-là arriver et prendre de l’ampleur, on s’est assuré de toujours rester une meilleure option, et moins onéreuse, pour les annonceurs. On est des producteurs de contenu avec une maîtrise des outils du marketing tech, une très bonne flexibilité et vélocité pour desservir les annonceurs à grand volume, avec plusieurs projets répétitifs. C’est vraiment là qu’on performe.»
Le travail acharné de son équipe, son intuition, son ingéniosité, son dynamisme et son sens des affaires auront permis à l’agence de traverser les années sans prendre une ride (ou presque ?).
Daniel Gendron se demande aujourd’hui s’il tient les rênes d’une M&H 2,0 ? 3,0 ? 4,0 ? «Je ne pourrais vraiment pas le dire. Mais je sais que des grands moments marquants et des étapes importantes dans l’histoire de M&H, il n’y en pas eux 2, je dirais plus 2000 ! (rires) Je peux par contre résumer en disant que pour nous, tout a constamment changé et qu’à chaque fois, on a su se réinventer avec brio. Pour le futur, nous misons sur l’importance de former la relève et d’avoir une équipe soudée. Cela a toujours été essentiel pour nous.»