Retour à l’époque où l’on pouvait encore aller au cinéma dans une salle comble (SOUPIR). Vous est-il déjà arrivé d’interpeller votre voisin de chaise par un coup de coude afin de lui chuchoter que le prochain film sur votre liste sera celui dont vous venez de voir dans la bande-annonce ? Il y a de fortes chances que vous ayez été accroché par la finesse de la technique de montage (et de maketing) ! Il y a aussi de fortes probabilités que vous ayez vu un trailer signé NOVAR Studios. Pause ciné en compagnie de Guillaume Prince, fondateur de la boîte spécialisée en création de bandes-annonces cinématographiques et télévisuelles.

Guillaume Prince
Guillaume Prince, président | NOVAR Studios
Crédit photo : Eric Lamothe

Un « rêve de p’tit gars » qui se concrétise

Alors qu’il était adolescent, Guillaume Prince, cinéphile dans l’âme, visitait le site trailersapple au quotidien afin d’explorer les bandes-annonces. Fasciné par le fait qu’on puisse synthétiser le 7e art en 2 minutes 30 secondes, il fait le serment qu’un de ces jours, il allait en créer une. Ce qu’il réalisa en 2012. Pour lui, c’est un « rêve de p’tit gars » qui s’opère. Ayant fait ses classes chez V (maintenant noovo), le réalisateur-monteur qui y a œuvré pendant 8 ans a dû quitter, non sans le cœur gros, car son « sideline » — qui est NOVAR Studios — prenait de l’ampleur. Il s’y consacre à présent à plein temps depuis les 3 dernières années. La boîte est récemment passée à 4 effectifs sur le payroll et emploie une dizaine de pigistes à contrats, allant de coordonnateurs, infographistes, monteurs et motion designers. « Faire une bande-annonce est un long processus qui implique beaucoup de gens et qui peut prendre jusqu’à un mois de travail intensif », précise-t-il.

Cette expansion, il la doit notamment grâce à l’obtention d’un contrat majeur avec Remstar Média (MAX et ELLE Fictions). Le studio s’occupe ainsi des services créatifs de ces chaînes représentant pas moins de 300 promos par an ! La boîte, qui offre des services pour le cinéma, la télévision, le web et le corporatif travaille également avec des distributeurs comme Les Films Séville, Entract Films, MK2 MILE-END et Maison 4:3.

Pour l’instant, Guillaume n’est pas trop inquiet pour son entreprise, malgré qu’il trouve dommage que le milieu culturel écope de nouveau avec cette seconde vague et ce reconfinement. Il spécifie qu’il fait 50 % de cinéma et 50 % de télévision, alors les projets roulent plutôt convenablement. Il faut dire que les chaînes MAX et ELLE FICTIONS ainsi que les Productions J — avec lesquelles le studio fait toutes les promos d’Occupation Double et de la Semaine des 4 Julie — les tiennent occupés ! Un beau problème puisque NOVAR Studios est booké des mois au préalable. D’ici le temps des Fêtes, le studio aura de « la broue dans le toupet », expose son fondateur.    

NOVAR Studios
Crédit photo : Eric Lamothe

Le film commercial, cet outil marketing 

Excitant, faire des bandes-annonces ? Oh que oui. Pour l’aficionado de cinéma qu’il est, Guillaume peine à contenir son exaltation. Il arrive que l’équipe visionne des films jusqu’à un an à l’avance. « On touche à du matériel que personne n’a vu : c’est ultra confidentiel », souffle-t-il. Au passage, il en profite pour faire une ode au cinéma d’ici. « On fait des beaux films au Québec. On a de bons réals, de bons acteurs. Le cinéma québécois connait une effervescence incroyable. » NOVAR Studios a même remporté deux prix au concours de l’APCQ pour la meilleure bande-annonce des films québécois 1991 (Ricardo Trogi) et de Paul à Québec (François Bouvier).

Détenteurs de compte Instagram, il se peut que vous ayez repéré une bande-annonce pour La Déesse des mouches à feu fort divergente de celle qui joue à la télévision. Un peu plus « trash », un peu plus « gore », sans censure. C’est parce qu’en télé, on doit s’en tenir au politically correct afin d’attirer monsieur madame Tout-le-monde dans les salles de ciné. Une bande-annonce, c’est carrément l’outil marketing #1 pour faire la promotion de la sortie prochaine d’un film. « Nous, notre but, c’est de vendre. C’est notre mandat. Alors on va tout faire pour y arriver. Les gens me disent souvent qu’on voit tout le film dans les bandes-annonces. C’est un peu vrai dans certains cas, mais pas tout le temps (RIRES) ! », avoue Guillaume. Si certains distributeurs vont vouloir mettre toute la gomme, d’autres sont plus réticents, comme les réalisateurs, afin de garder des éléments-surprises de leur œuvre au grand écran.

Pour la petite histoire : afin d’attirer foule au ciné, et élargir le public au maximum, il faut montrer toutes les facettes d’un film. Si un distributeur souhaite une bande-annonce courte (teaser), une bande-annonce longue (trailer) et un second trailer en cours de route et que vous les regardiez tous back-to-back, il se peut que vous ayez l’impression d’avoir vu le film dans son intégralité ! Guillaume soutient que c’est souvent une fausse impression, car beaucoup de punchs sont préservés pour le film.  

Revenons à nos moutons. Les réseaux sociaux permettent un certain laxisme. C’est pourquoi après discussion avec la réalisatrice du film La Déesse des mouches à feu, Anaïs Barbeau-Lavalette, et le distributeur, Entract Films, la bande-annonce destinée au grand public a été remaniée en un clip de 30 secondes afin de séduire un public plus jeune. Du jamais vu au Québec : NOVAR Studios a opté pour une version « red-band », qu’on voit davantage chez les Américains. Dans le jargon du cinéma, il s’agit d’une bande-annonce classée R, signifiant « Restricted » selon le système de classification de films aux États-Unis établi par la MPAA (Motion Picture Association of America). La version « green-band » sera quant à elle approuvée pour toutes les audiences. D’où le panneau d’avertissement vert ou rouge en début de trailer.

« On n’avait aucune contrainte créative », s’enthousiasme Guillaume, qui décrit la bande-annonce comme vulgaire avec ses scènes de sexe, drogue & p’tits bums sniffant de la mescaline. « Je trouve ça cool, parce qu’on n’a pas coutume de faire des “red-band” au Québec. » Comme prévu, le clip a fait un tabac sur Instagram.

Le storytelling du trailer

Réalisateur-monteur de profession et directeur de création, Guillaume touche moins au montage, puisqu’il a sa boîte (et de la paperasse) à gérer. Loin de s’en plaindre puisqu’il estime qu’il s’agit d’une évolution naturelle de sa carrière, il considère qu’une grande partie de son travail est d’être « la muse » de ses réals-monteurs. « Je suis là pour les stimuler et les rendre meilleurs. » Il visionne toutefois les films avec son équipe sur l’écran cinéma qui orne les bureaux de NOVAR Studios. C’est d’ailleurs à cet endroit que le fun s’amorce.  

NOVAR Studios
Crédit photo : Eric Lamothe

Le travail du réalisateur-monteur est minutieux, à mi-chemin entre la créativité et la technique. Lorsque le studio reçoit un film, l’équipe le dévore à titre de téléspectateur pour bien prendre le pouls. Ensuite, elle brainstorm ensemble pour déterminer quelles scènes seront sélectionnées pour les trois actes de la bande-annonce. Souvent, les plans du début et de la fin seront cruciaux. Le début pour accrocher l’audience et la fin pour l’effet « wow ». Le milieu sera consacré au storytelling pour livrer toutes les facettes du film dans un court format. Ensuite, le film sera écouté une seconde fois dans un logiciel de montage afin de s’assurer que toutes les meilleures scènes du film soient prêtes à monter avant l’étape la plus primordiale, qui est le choix musical.

« La musique est l’essence de tout bon montage », rappelle Guillaume. Adage qu’il ne se lasse pas de réitérer à ses pairs.
« Si on n’est pas convaincu de la musique, ça risque de ne pas fonctionner. Si tu écoutes la musique et que tu visualises déjà la bande-annonce sur celle-ci, alors là tu risques de frapper fort ! C’est là où tout se joue », révèle-t-il. Une fois la musique ajoutée, les cartons de titres (comme un film de, d’après le roman à succès de, une réalisation de, et la distribution) seront introduits pour donner du rythme au montage et ils aideront également à découper le contenu de la bande-annonce.

Préférant ne pas influencer ni donner de directives pour ne pas que l’équipe stagne dans sa créativité, les distributeurs donnent souvent carte blanche à NOVAR Studios. Il arrive que le résultat fit du premier coup. D’autres fois, il peut être le résultat d’un compromis entre plusieurs personnes et visions. « Il n’y a pas de gros ego chez NOVAR et on est très compréhensifs. Il y a énormément de gens impliqués : les producteurs, les réals, les distributeurs et parfois même les acteurs. Mais on est là pour accommoder tout le monde. »

Guillaume Prince 2
Crédit photo : Eric Lamothe

Le trailer : un nouvel art ?

Manifestement épris par son métier, Guillaume étale l’origine du nom de sa jeune compagnie. NOVAR Studios est un diminutif de « nouvel art ». La lettre V, au centre de NOVAR, est un easter egg à son ancien employeur — celui qui a fait de lui le réalisateur-monteur qu’il est aujourd’hui. Studios au pluriel, parce que Guillaume a de grands projets pour NOVAR. Mais, chaque chose en son temps. « À long terme, on souhaite monter des films et des séries télé au complet et faire de la production de contenu original. On veut maîtriser ce qu’on fait avec nos contrats actuels. Un jour, le “s” prendra tout son sens », divulgue le directeur de création. 

Puisque les rudiments de la profession s’apprennent plus souvent qu’autrement par soi-même, car aucune spécialisation n’existe, Guillaume n’écarte pas la possibilité d’offrir des cours sur l’art de la bande-annonce. Lui-même a perfectionné sa technique en restant aux aguets de ce qui se fait ailleurs, notamment aux États-Unis. En outre, les clients de NOVAR Studios adorent la technique « américanisée » du studio et la qualifie souvent de « Hollywood ».

Tandis que les entreprises spécialisées dans le trailer pullulent chez nos voisins du Sud, l’avantage de NOVAR Studios, c’est qu’elle est unique au Québec et est ultra spécialisée. « On est la seule entreprise au Québec qui a une structure pour faire des bandes-annonces de films. On offre un service clé en main. Dès la réception du matériel jusqu’à la création, on fait tout de A à Z. Tu arrives chez nous avec ton footage vidéo et on fait de la magie avec ça jusqu’au broadcasting », termine-t-il.

Pour découvrir l’univers fascinant de la bande-annonce, rendez-vous sur www.novarstudios.com ou visitez la page Facebook du studio