Puisque j’ai atteint la cinquantaine cette année, j’ai connu à mon arrivée sur le marché du travail, au début des années 80, un monde bien différent de ce qu’il est aujourd’hui. Comme plusieurs de mes contemporains et d’autres qui nous ont précédés, je me suis engagée dans ma carrière en projetant sur ma relation avec mes employeurs, certains des éléments qui caractérisaient ma relation avec mes parents.
Selon ce modèle, mon attente était que si je m’avérais «une bonne enfant», (donc engagée envers l’organisation et offrant un rendement satisfaisant), mes patrons, qui incarnaient le rôle du « bon parent », veilleraient à mon bien-être et mon évolution et me récompenseraient lorsque l’effort consenti ou la réussite qui en découlait étaient de l’ordre de l’exceptionnel. En ce qui me concerne personnellement, cette façon de percevoir mon lien d’emploi était d’autant plus ancrée, puisque au cours des premières années, je travaillais effectivement pour mon père!
Plus de trente années ont passé depuis mon premier emploi. Pour ma part, je n’ai plus de patron depuis plus de 15 ans, mais ma pratique m’amène quotidiennement à échanger avec des travailleurs de ma génération qui m’expliquent leur déception de ne pas voir leur loyauté réciproquée par leurs employeurs. Ils se désengagent à l’égard de leur évolution, récompensent rarement leur labeur par l’accès à des promotions et sourcillent à peine lorsque les impératifs organisationnels font en sorte qu’ils doivent se départir de leurs services.
Malgré ces désillusions, plusieurs ne changent pas leurs expectatives. Ils espèrent toujours que leurs employeurs leur assureront une sécurité d’emploi et qu’ils assumeront la responsabilité de guider et nourrir leur évolution professionnelle. Manifestement, ils démontrent de l’amertume lorsque leurs attentes sont déçues. Souvent, ils se montreront aussi critiques à l’endroit des plus jeunes, déplorant leur manque de dévouement à leurs employeurs et considérant présomptueuses ou égoïstes plusieurs de leurs exigences. Pourtant, à mes yeux, ces jeunes travailleurs se montrent tout simplement mieux adaptés au marché du travail d’aujourd’hui…
Au cours de mes échanges avec ces travailleurs désenchantés, je les invite souvent à réfléchir à l’égard du contrat psychologique, (c’est-à-dire l’entente implicite), dans lequel ils se sont engagés à leurs débuts sur le marché du travail. Je leur souligne combien les fondements de celui-ci ont été modifiés à travers les années et leur reflète les différences essentielles qui caractérisent le contrat qui est proposé aux plus jeunes…et qui nous concernent maintenant tous. Je leur propose de définir comment leurs attentes, leur engagement et leurs comportements se doivent d’évoluer pour offrir une cohérence avec ce nouveau contrat psychologique.
Jusqu’à il y a quelques années, je n’avais pas été en mesure d’identifier des références accessibles et fiables à offrir à mes clients pour appuyer leur réflexion sur cette question. J’étais donc très excitée lorsque j’ai déniché cette publication «Le nouveau contrat psychologique et le développement de l’employabilité» sur le site de REMEST, une publication scientifique sur le travail et ses transformations. Ce document défini clairement la notion du contrat psychologique et offre un tableau qui permet de noter l’évolution de celui-ci au cours des 30 dernières années.
Le constat général que retirent la majorité de mes clients de leur réflexion et de l’étude de cette publication, c’est qu’ils doivent prendre en charge directement la gestion de leur carrière. Certains préfèreront retenir mes services pour les accompagner au cours des années, pour réfléchir avec eux et leur rappeler leurs engagements, alors que d’autres choisiront de naviguer seuls. L’ensemble convient par ailleurs qu’il est nécessaire de se responsabiliser pleinement quant aux actions à entreprendre, pour avoir le pouvoir de définir sa destinée professionnelle. Ce faisant ils développent leur employabilité, plutôt que de tout miser sur leur emploi du moment.
En quoi consistent ces actions? Elles peuvent varier d’un individu à l’autre, mais de l’ensemble, des dénominateurs communs émergent.
• Définir des objectifs personnels annuels, mais aussi des objectifs mensuels, hebdomadaires et quotidiens. L’approche S.M.A.R.T. (spécifique, mesurable, accepté, réaliste, temporellement défini) est favorisée par plusieurs;
• Se dépasser, c’est-à-dire aller au-delà de sa zone de confort, sélectionner sciemment des activités habituellement évitées, ou qui sortent du secteur d’expertise maîtrisé;
• S’intéresser davantage au secteur d’activité au sein duquel on travaille, observer son évolution, sa transformation, l’étudier consciencieusement. De même pour la profession pratiquée, la fonction occupée. Comment se compare-t’on aux individus qui exercent la même fonction dans une organisation concurrente? Dans d’autres secteurs d’activités?
• Lire, démontrer de la curiosité, écouter, solliciter l’opinion des autres (collègues, clients, fournisseurs) à l’égard de notre prestation de travail, tendre l’oreille lorsqu’on nous parle de nouvelles opportunités, même lorsqu’on est satisfait de sa situation;
• Réseauter - pour mieux connaître les acteurs de notre secteur d’activité, acquérir ce faisant une meilleure compréhension de celui-ci et bien sûr se faire connaitre et établir des liens significatifs qui pourront devenir porteur d’opportunité.
En résumé, si vous voulez évoluer professionnellement, n’attendez pas passivement qu’on découvre enfin votre talent et votre valeur, pour vous offrir une promotion ou l’emploi de vos rêves. Reconnaissez tout d’abord vous-même votre valeur et attardez-vous à comprendre comment votre apport peut répondre aux besoins et aux enjeux de votre secteur et votre fonction. C’est ainsi que vous saurez discerner les opportunités ou les accueillir, si d’aventure elles frappent à votre porte!