Combien de temps par semaine passez-vous au bureau ou à travailler en moyenne? Si vous travaillez à temps plein, on peut s’entendre pour dire que c’est la majorité de votre semaine. Et le climat de travail, il est comment? Est-ce qu’il affecte votre productivité et votre motivation?
L’état de l’environnement de travail est un facteur primordial à l’état de la santé mentale d’un·e employé·es. Travailler dans un environnement malsain nous affecte beaucoup plus qu’on peut l’imaginer.
Jessy Riel, fondatrice d’Ax Conseil, accompagne les gestionnaires d’entreprises dans leurs enjeux de nature humaine. Elle a accepté de collaborer avec le bec pour nous aider mieux comprendre le rôle de l’environnement de travail dans le bien-être d’un·e employé·es.
Quelles seraient 3 questions à se poser pour savoir si on cultive un environnement psychologiquement sécuritaire et bienveillant (ou si on est dans la bonne voie) en tant qu’entreprise?
Jessy : Il y existe de très bons indicateurs qui permettent d’identifier si l’entreprise possède une bonne santé organisationnelle, et c’est ce que je les amènerais à regarder en premier lieu; en mesurant le taux de roulement de leur personnel, ainsi que leur taux d’absentéisme et d’arrêt de maladie. Si les taux sont élevés, il y a assurément des enjeux à examiner afin de régler les problèmes à la source. Toutefois, attention ! Il ne faut pas s’arrêter uniquement à ces mesures, car il peut arriver que les taux soient bons sans que l’entreprise cultive pour autant la santé et le bien-être au travail. Dans certaines cultures organisationnelles, l’encouragement à la performance est si fort que s’absenter est souvent inconcevable, et ce, malgré la présence de symptômes liés à la santé mentale… De plus, comme une mesure est l’équivalent d’un portrait, il se peut qu’elle change en peu de temps. Pour pallier aux risques et aller chercher des informations plus subjectives, j’inviterais les dirigeant·es et les gestionnaires à estimer, avec honnêteté, le pourcentage d’employé·es qui n’hésiteraient pas une seconde à y recommander leurs plus proches ami·es. Avec ces réponses, les employeurs devraient avoir une bonne idée de s’ils sont ou non sur la bonne voie en matière de bien-être au travail !
Quels sont les principaux enjeux que tu as vus dans les dernières années dans les entreprises œuvrant dans le milieu des comm-marketing?
Jessy : Malheureusement, ce sont les risques pour la santé mentale que j’observe le plus souvent, et ce, en lien avec les exigences élevées du milieu. Mes client·es issus des comm-marketing et du design graphique me rapportent qu’année après année, ils·elles ont l’impression de devoir en faire toujours plus avec moins. La forte concurrence sur le marché les amène à recevoir la pression de leur gestionnaire, de devoir facturer plus avec moins, et de parvenir à réaliser plusieurs mandats à la fois avec le même niveau de qualité et d’efficacité. De plus, les employé·es ont à composer avec la relation client et les attentes de ces derniers, tels que des livrables attendus pour hier… Et, comme c’est un domaine artistique, les directives reçues et la rétroaction permettant d’améliorer son travail ne sont pas toujours claires, ce qui peut rendre très ardue l’estimation du temps nécessaire à la réalisation d’une tâche. Ce sont tous des facteurs de risques psychosociaux importants qui impactent négativement la santé mentale, mais aussi la santé des équipes et de l’organisation.
J’ajouterais qu’en début de carrière, ces professionnel·les trouvent souvent cette performance attrayante et stimulante, car leur motivation est au top et les attentes à combler représentent de nouveaux défis à relever. En plus, les défis qu’ils·elles rencontrent correspondent généralement à leur courbe d’apprentissage, les talents arrivent à les surmonter en se sentant compétents et valorisés. Toutefois, lorsque cette dernière est atteinte et/ou que le stress commence à s’accumuler en raison des exigences élevées, mais aussi du dépassement inconscient de ses propres limites personnelles et professionnelles, des conséquences humaines se font ressentir (anxiété, démotivation, désengagement, perte de créativité, problème de concentration, doute de soi, etc.). Il est donc primordial de reconnaître les risques propres à ce milieu afin que les gestionnaires et les employé·es puissent les adresser adéquatement.
Comment est-ce que ça peut rapporter à une entreprise d’investir et de s’assurer de conserver un environnement de travail psychologiquement sécuritaire et bienveillant ?
Jessy: Un environnement de travail où la santé et le bien-être prônent, c’est rentable sur toute la ligne ! Le dernier rapport de Deloitte montrait un retour sur investissement d’environ 2,17 $ pour chaque dollar investi en matière de santé et mieux-être au travail après 3 ans. Il est donc hyper important que les entreprises intègrent le fait que le bien-être au travail n’est pas en opposition avec la performance organisationnelle, et que le lien entre la santé des individus et la productivité est direct ! L’équation est simple, un·e employé·e heureux·se au travail est un·e employé·e engagé·e qui mobilisera tout naturellement les ressources nécessaires pour atteindre les objectifs de l’entreprise. En plus, cet·te employé·e heureux·se et en santé deviendra le·la meilleur·e ambassadeur·drice que l’organisation ne pourrait avoir, ce qui haussera le taux de rétention, facilitera l’attraction et le recrutement, et diminuera le taux de présentéisme et l’absentéisme. Autrement dit, une entreprise qui veille à assurer la qualité de vie au travail s’offre automatiquement des conditions favorables à son succès et à sa santé financière !
Que penses-tu de la réforme de la CNESST, incluant maintenant les risques psychosociaux et qu’est-ce que tu penses que cela fera comme différence?
Jessy: Pour prévenir efficacement les risques professionnels réellement présents pour la santé mentale des travailleur·ses, il était primordial de rendre la Loi sur la santé et la sécurité du travail plus détaillée, claire et objective sur un sujet qui laissait jusqu’en 2021 encore beaucoup trop de place à l’interprétation. J’ai la conviction que cette Loi, qui a pour objet « l’élimination à la source même des dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique et psychique des travailleur·ses » (RLRQ c. S2.1, art. 2.) aura un impact positif, puisqu’elle ne permettra plus aux entreprises caractérisées de peu consciencieuses en la matière de se défiler de leurs responsabilités ou de les ignorer grâce à la subjectivité d’autrefois. D’ici 2024, toutes les organisations auront à démontrer comment elles préviennent les risques psychosociaux et qu’elles prennent en charge les diverses sources de stress dommageables liés à l’environnement et à l’organisation du travail. Les plans d’action en matière de prévention devront être clairs !
Je tiens à rassurer ceux·celles qui peuvent être effrayé·es par l’implantation de ces nouvelles mesures, de nombreux outils existent pour vous guider dans les démarches à entreprendre, et probablement que sans le savoir, vous agissez déjà en prévention des risques ! Vous pouvez également vous appuyer sur les recommandations émises par l’Organisation mondiale de la santé en septembre 2022 sur la santé mentale au travail afin d’identifier des pistes d’actions concrètes et efficaces à implanter.
Qu’est-ce qui t’a influencé ou motivé à faire ce que tu fais?
Jessy: J’ai moi-même été victime des risques psychosociaux, je vous épargne les détails, mais lorsque nous parlons des conséquences liées aux violences internes, à l’absence de clarté dans les directives, et à la perte d’autonomie décisionnelle, croyez-moi je sais de quoi je parle ! Après m’être libérée de ces pratiques de gestion profondément toxiques et avoir pris conscience de l’ampleur des dommages psychologiques qu’elles avaient eus sur moi, j’ai pris la décision de fonder ma propre entreprise, Ax Conseil, afin d’agir activement sur la prévention des risques psychosociaux. C’était un sujet dont on parlait peu en 2018. Depuis, je conseille et je forme les gestionnaires et dirigeant·es d’entreprise dans la saine gestion de leurs équipes de travail afin d’assurer le bien-être de leurs salarié·es. C’est une mission que j’ai à cœur et qui me passionne profondément, car elle relie deux de mes terrains de jeux préférés, soit la santé mentale et le management. Cela m’a d’ailleurs amené à cofonder, avec ma partenaire Camille Lin de Groupe-conseil Perrier, un diagnostic en santé organisationnelle afin d’optimiser la qualité de vie au travail et les pratiques de gestion !
Dans tes mots, quelle est ta définition du bien-être?
Jessy: Le bien-être est pour moi un état dans lequel nous parvenons à ressentir satisfaction, plaisir, bonheur, énergie et sens, et ce, dans nos différentes sphères de vie. Il est essentiel à l’humain, car il favorise tout naturellement la santé physique et psychologique, en plus de lui permettre de surmonter plus aisément les aléas de la vie en accueillant sainement et sereinement toute une palette d’émotions.
Pour en savoir plus sur les services de Jessy Riel et son entreprise Ax Conseil, consultez le site web au axconseil.com.
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Si vous cherchez des spécialistes pour vous aider avec vos enjeux en entreprise, consulter la section « se former » du site web du bec pour découvrir des ressources.
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