Il suffit d’ouvrir les yeux sur les produits qui nous entourent pour remarquer la grande gamme de produits dits « écologiques » ou de faire une recherche sur l’un des réseaux sociaux avec le mot-clic #ecologique pour le constater.
Bouteille d’eau écologique.
Détergent écologique.
Sacs en papier écologique.
Vous êtes-vous arrêtés un instant à ce que l’adjectif « écologique » veut dire ? Ou ce qu’il veut encore dire aujourd’hui ? On comprend qu’un produit écologique respecte l’environnement. Par respect de l’environnement, on entend qu’il a des effets négatifs négligeables, ou bénéfiques sur celui-ci. Comment pouvons-nous, en tant que consommateur.trice, accepter qu’un sac en papier identifié comme écologique puisse réellement l’être sans se poser de questions ? Pourtant, ce sac a nécessité la coupe d’arbres, a subi de nombreuses étapes de transformation, dont l’utilisation de produits toxiques, a été distribué possiblement en paquebot, en train, en camion, sera utilisé une seule fois (peut-être deux) avant d’être jeté (ou au mieux recyclé). Ce sac respecte-t-il vraiment l’environnement ? Le terme
« écologique » est couramment utilisé dans des messages créés par des spécialistes de la communication et du marketing. Il perd maintenant de son sens et les conséquences ne sont pas anodines.
Il s’agit bien d’une sorte de « greenwashing », ou d’écoblanchiment. Si les grandes entreprises deviennent plus conscientes des risques d’être pointées du doigt, des formes d’écoblanchiment plus subtiles sont bien présentes et sont utilisées autant par les moyennes que les petites entreprises.
Le problème est que l’utilisation du terme « écologique » et ses variantes comme
« respectueux de l’environnement », « non polluant » ou « durable » sont trop vagues pour expliquer clairement au consommateur la réalité des avantages écologiques du produit. Il l’induit en erreur, sème la confusion et contribue au scepticisme déjà bien réel des consommateurs envers les publicités.
Les conséquences vont plus loin. Libre au consommateur de constater si son détergeant rend son chandail blanc réellement plus blanc. Toutefois, l’argument écologique a des responsabilités bien plus grandes qu’une promesse d’efficacité d’un produit. Comme le mentionne Mathieu Jahnich (2018), lorsqu’il fait l’état des lieux de l’écoblanchiment : « Un argument écologique est porteur d’une dimension collective. Les parties prenantes, les ressources naturelles, voire les générations futures sont tout à coup intégrées à la promesse publicitaire. » La mésutilisation, et l’utilisation erronée d’adjectif écologiques nuit à la prise de conscience collective ainsi qu’aux efforts sincères de sensibilisation environnementale.
Les spécialistes de la communication et du marketing tombent-ils dans le piège de l’écoblanchiment par manque de considération ou par manque de connaissance ?
Il est légitime de vouloir communiquer les qualités environnementales d’un produit, les améliorations apportées et les éco-innovations véritables et vérifiables. Dans ce cas, les spécialistes du marketing et de la communication ont la responsabilité de participer à cette conscience collective.
Comment y arriver ?
Tout d’abord en sensibilisant les équipes de communication et marketing aux enjeux du développement durable, puis en les formant, notamment sur la communication responsable et sur les normes entourant les autodéclarations environnementales comme par exemple les normes CAN/CSA-ISO 14021. Ainsi, les arguments écologiques ne seront utilisés que s’ils répondent aux critères établis et nuancés de manière proportionnelle. Une communication dite responsable nécessite de disposer préalablement de toute l’information relative à la qualité écologique du produit. Les sciences de l’environnement sont en effet complexes. Il est conseillé pour les agences qui souhaitent se spécialiser en communication responsable de suivre une formation préalable. Cela leur permettra de saisir la complexité du cycle de vie des produits et de ses impacts.
Il sera pertinent de nommer un responsable en développement durable au sein d’une équipe de communication. Celui-ci pourra déterminer quand et comment faire appel à des experts du domaine pour veiller à véhiculer des messages véritablement responsables. D’ailleurs, pourquoi ne pas créer des partenariats avec différents acteurs, dont les organismes environnementaux, les associations de consommateurs, voire les consommateurs en mesure de valider la véracité du message ?
Redonner tout son sens en définissant précisément l’attribut « écologique » est le point de départ de toute campagne de communication responsable. Ajuster nos réflexes pour adopter des modes de communication respectueux de l’environnement permettra de bonifier les métiers de la communication. Plus que jamais, nous avons un véritable rôle à jouer dans la sensibilisation et l’adhésion des consommateurs.
Ce texte fait partie d’une série de publications visant à vulgariser la communication et le marketing responsable par le Collectif Communication Citoyenne (C3), un réseau d’experts multidisciplinaires.
Jahnich, M. sous la direction de Tremblays, S. D’Almeida, N. et Libaert, t. (2018). Développement durable. Une communication qui se démarque, Montréal, Presses de l’Université du Québec.
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