Affaires de l'industrie

Créative: Épisode 3 – Les fausses bonnes idées

17 avril 2025

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Cette série fictive suit le parcours de Marc, un dirigeant d’agence confronté à une fatigue collective… et à ses propres angles morts.

Après une conversation inconfortable avec Isabelle, Marc décide d’agir. Il propose un plan. Une solution. Une nouvelle structure.

Mais cette semaine, il découvrira que les solutions trop rapides peuvent devenir des pièges bien intentionnés — et que le vrai problème n’a pas encore été nommé.

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Le lendemain du café avec Isabelle, Marc se lève tôt. Trop tôt pour quelqu’un qui dort mal.

Dans sa tête, des idées se bousculent. Il veut faire quelque chose. Pas dans six mois. Pas après une étude de marché interne. Maintenant.

Il ouvre son carnet, aligne des points :

•            Réduction des livrables par client

•            Temps créatif protégé chaque semaine

•            Plages horaires sans meeting

•            Nouveau système de briefing simplifié

Il passe la journée à bâtir un plan d’action. Structuré. Sincère. Pensé pour soulager les équipes. Pour changer la cadence. Pour agir.

Et dès le lendemain, il le présente à son comité exécutif.

Ils sont cinq autour de la table : RH, médias, stratégie, création, opérations. Des piliers de l’agence. Marc déroule son plan, appuyé par un beau deck, comme si ça allait l’aider à passer plus doucement.

Il parle d’équilibre, d’espace, de santé mentale. Il cite des chiffres, des tendances, des insights sur l’épuisement dans l’industrie. Il est habité, mais nerveux. Il sent que quelque chose ne colle pas. Il termine.

Silence.

C’est Zarah, sa directrice de stratégie, qui parle en premier.

— Merci pour ça. On sent que ça vient d’un vrai désir de changer les choses.
— Mais ?
— Mais on est en train de faire ce que font toutes les agences quand elles paniquent : on saute aux tactiques.

Marc fronce les sourcils.

Luc, à la création, intervient.

— Je pense que ce n’est peut-être pas encore le moment pour ce genre de plan. Peut-être que ce qu’il faut en ce moment, c’est arrêter de deviner.

La directrice RH enchaîne :

— On ne sait même pas clairement ce qui pèse sur les gens. On s’entend que c’est la cadence, le manque de reconnaissance, les attentes floues. Mais est-ce que ce sont des problèmes ou des symptômes?

Marc reste silencieux.

C’est vrai. Il n’a pas consulté. Il n’a pas pris le pouls.
Il a voulu passer à l’action avant même de poser la bonne question.
Comme s’il croyait que faire quelque chose, n’importe quoi, valait mieux qu’attendre.

Marc soupire. Il regarde son propre document, tout à coup trop lourd, trop propre.

— J’ai voulu prendre les devants.
— Et c’est noble, dit Zarah. Mais parfois, prendre les devants, c’est aussi laisser les autres derrière.

La phrase tombe doucement. Elle ne pique pas.
Mais elle reste.

Marc reste seul quelques minutes. Il regarde le tableau blanc.
Il pense à Isabelle, à sa phrase : « T’as juste à pas perpétuer le système sans réfléchir. »

Et il se demande :
Est-ce que j’ai vraiment regardé ce système en face ?
Ou est-ce que j’ai juste essayé de le réparer avec les outils que je connais déjà ?

Il efface les premières lignes de son plan. Pas pour les oublier. Mais pour faire de la place à une autre méthode.

Une qui commence par une question: Pourquoi ?

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