Affaires de l'industrie

Influenceur·euses : diversifier pour durer

par Lea D. Nguyen 23 avril 2025

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Longtemps, les créateur·rices de contenu ont jonglé avec la pub comme principale source de revenus. Pratique, mais aléatoire. Aujourd’hui, la donne change. Pour éviter de jouer au yo-yo avec leurs finances, certain·es prennent un virage stratégique : abonnements payants, commandites, contenu exclusif… Histoire de monétiser autrement qu’en restant soumis·e aux capricieux algorithmes.

La pub, c’est bien… mais ça ne paie pas toujours les factures
Le modèle de partage des revenus publicitaires a longtemps été la vache à lait du contenu en ligne. Mais en 2025, difficile d’en vivre sans aligner des millions de vues. Le modèle fonctionne pour les médias traditionnels et les plateformes massives, mais il est nettement moins lucratif pour les créateur·rices indépendant·es. « Même avec le partage des revenus de YouTube, il faut des dizaines, voire des centaines de milliers de vues pour que ce soit viable », explique Denis Martel, stratège en marketing numérique et producteur. Entre le CPM qui fluctue et la course aux clics, la pub seule n’est plus une garantie de stabilité.

Denis Martel

Abonnements payants : un filet de sécurité
Patreon, YouTube Memberships, OnlyFans (pour les plus téméraires), et bien plus. Le modèle d’abonnement permet de générer des revenus plus stables en offrant du contenu exclusif à ses abonné·es. Moins de dépendance aux annonceurs, plus de contrôle sur sa ligne éditoriale. Sur papier, c’est du win-win. Denis Martel affirme que certain·es créateur·rices très connu·es au Québec ont bâti leur succès sur ce principe. « Pour ceux·celles qui ont une base solide d’abonné·es, c’est une vraie sécurité financière », souligne-t-il. Moins de pression sur la viralité immédiate, mais une attente de régularité. « C’est un contrat moral avec ses abonné·es. Il·elles paient, donc il·elles attendent du contenu de qualité régulièrement », ajoute-t-il.

Cette charge mentale peut mener à un essoufflement, voire à des problèmes de santé mentale chez certain·es créateur·rices, qui se retrouvent enfermé·es dans une production effrénée. Certain·es contournent cette pression en proposant une exclusivité temporaire avant d’ouvrir le contenu à tous·tes. Un bon compromis entre fidélisation et visibilité.

Commandites et placement de produit : un retour aux classiques
Si l’abonnement demande un engagement fort, les collaborations avec des marques restent une valeur sûre. Mais fini le temps des placements forcés et des codes promo balancés à la va-vite. Aujourd’hui, on parle d’intégration fluide, alignée sur l’univers du·de la créateur·rice.

Denis en sait quelque chose : « J’ai fait des collaborations avec des clients du paragouvernemental et du monde associatif et d’autres organisations. C’est du marketing de contenu où je vais intégrer un·e représentant·e du client dans mes interviews ou podcasts en restant cohérent et m’assurant d’apporter de la valeur à l’auditeur. » D’ailleurs, certaines marques intègrent leurs produits directement dans le contenu sans qu’on ait l’impression de se faire vendre quoi que ce soit. Tant que ces placements respectent le ton et la ligne éditoriale, ils ne posent pas problème. Mais Denis met en garde : « Si une marque influence ta ligne éditoriale, tu risques de perdre en crédibilité. » L’authenticité reste le mot d’ordre ici.

Construire une communauté
Peu importe la stratégie, tout repose sur l’engagement du public. Un bon exemple ? Le podcast Distorsion, qui a fédéré une véritable communauté de passionnés de true crime au Québec, partage Denis. Le groupe Facebook, très actif, regroupe des milliers de membres qui interagissent et co-créent du contenu, souvent même sans intervention directe des créateurs.

Dans un monde où l’audience est abreuvée d’offres sur Netflix ou Disney+, convaincre quelqu’un de payer pour un contenu indépendant exige un véritable attachement au·à la créateur·rice « Si l’audience peut accéder gratuitement au même contenu ailleurs, il faut une forte connexion émotionnelle et un bénéfice concret pour la pousser à payer », souligne Denis.

L’avenir du marketing d’influence
Si les modèles évoluent, une chose est sûre : les influenceur·euses qui tirent leur épingle du jeu sont ceux·celles qui partagent des revenus publicitaires, abonnements, commandites, placement de contenus et de produits. Trop dépendre d’un seul revenu ? Risqué. Trop en faire ? Perte d’authenticité.

Enfin, Denis rappelle l’importance de soutenir les créateur·rices de contenu : « Si vous aimez le travail d’un·e créateur·rice indépendant·e et que vous en avez les moyens, soutenez-le·la, ça peut faire une vraie différence. » Alors, la prochaine fois qu’un·e créateur·rice vous fait vibrer, pensez-y : un abonnement, un like, un partage… ça peut tout changer !

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