Après une longue période de pourparlers, la nouvelle entente collective entre l’Association des producteurs conjoints (APC) et l’Union des artistes (UDA) est finalement entrée en vigueur. Fruit de longues discussions, de négociations, d’arguments fluctuants et de compromis de part et d’autre, l’entente a atteint son objectif : revisiter les conditions inhérentes à la production publicitaire pour les rendre plus actuelles, flexibles et équitables.
L’ APC, qui regroupe l’Association canadienne des annonceurs (ACA), l’Association des agences de communication créative (A2C) et l’Institute of Canadian Agencies (ICA), ainsi que l’UDA, ont finalement conclu cette entente tant attendue qui visait « la modernisation et la jonction des ententes collectives TV-radio et Internet et nouveaux médias ». Pour les parties prenantes, elle devait répondre plus justement aux enjeux actuels qui touchent l’industrie de la production publicitaire dans la province.
Les deux comités de négociation ont multiplié les rencontres pour arriver à l’adoption de cette entente commune qui sera réellement bénéfique pour tous et toutes, affirme Dominique Villeneuve, présidente-directrice générale de l’A2C. « Au départ, il y avait deux ententes collectives, l’une sur la télévision et la radio, l’autre qui portait sur Internet et les nouveaux médias. Celle pour la télévision et la radio avait été renouvelée au fil des ans, mais elle datait de plusieurs années, et avait été adoptée à partir d’un écosystème qui date de plus 40 ans. Le volet Internet et nouveaux médias était plus récent, mais l’industrie change rapidement, et n’est aujourd’hui évidemment plus la même. »
Les bases de négociations et la structure de la nouvelle entente, qui allait regrouper les composantes de ces deux précédentes ententes « très différentes » en une unique version, se sont donc appuyées sur ces anciens documents. « Certaines clauses étaient en opposition, certaines plus récentes, d’autres plus vieilles, et des frais s’appliquaient aussi à l’une et l’autre des ententes et venaient se dédoubler. Donc tout a été pensé ensemble et évalué pour rendre ça plus cohérent, et moderniser certaines composantes », ajoute Patrick Hotte, vice-président, Québec, de l’ACA.
Entourés d’un comité formé de producteur·rices de l’industrie et de gestionnaires d’agences publicitaires, Dominique Villeneuve et Patrick Hotte se sont retrouvés au centre de la table des négociations. L’entrée en vigueur de la nouvelle entente, qui s’échelonnera sur une période de 3 ans, a été annoncée en décembre dernier, mais est entrée en vigueur en avril. Les deux gestionnaires, qui affirment avoir travaillé dur (et longtemps !) aux côtés de l’UDA et de leurs collègues de l’industrie pour arriver à une entente aussi juste que complète, se disent très fiers du résultat. « C’est monumental comme gain, comme accomplissement, pour toutes les parties prenantes, incluant les artistes », résume Dominique Villeneuve.
Ce nouvel encadrement facilitera notamment le travail sur le terrain et encouragera la production publicitaire en sol québécois, ajoute-elle. « L’entente permet de définir des conditions minimales d’embauche pour les artistes qui sont équitables et représentent justement le travail réalisé. Il y a également des spécifications en matière de permis de travail, une bonification des tarifs médias numériques accordés, ou encore un jumelage au niveau des tarifs radio et audio numérique. Ce sont plusieurs changements et ajouts qui seront bénéfiques autant pour les artistes, que pour les producteurs et les annonceurs. »
La Loi sur le statut professionnel des artistes des arts visuels, du cinéma, du disque, de la littérature, des métiers d’art et de la scène, qui régit les réglementations de l’industrie de la production artistique et publicitaire, a, quant à elle, été modernisée en 2022. L’entente collective vient donc suivre le pas en appuyant ces changements, explique la présidente. « Certains éléments de la loi, notamment en matière de santé et sécurité ou de prévention du harcèlement, ont été revus, ce qui a donné lieu à repenser nos propres ententes et à bonifier certaines clauses à ce niveau. »
S’entendre pour plus de flexibilité
En quoi cette entente est-elle incontournable pour l’écosystème publicitaire québécois ? Les avantages sont multiples, et les modifications apportées sont win-win, croient Dominique Villeneuve et Patrick Hotte, mais son adoption rendra surtout plus flexible la production publicitaire. « C’est important de la rendre accessible, mais surtout d’améliorer son efficacité, explique Patrick Hotte. Les agences doivent être en mesure de produire rapidement, et avoir une seule entente simplifie globalement le travail. »
Les délais pour réaliser les projets en publicité sont aujourd’hui beaucoup plus courts, confirme Dominique Villeneuve. « Dans le passé, il y avait beaucoup plus de temps alloué pour produire un spot télé, par exemple. Aujourd’hui, les délais sont non seulement raccourcis, mais les budgets sont serrés et fragmentés. Il faut faire plus, avec moins, et être très créatif·ves dans nos approches. L’entente vient répondre à ce besoin-là. »
L’entente favorise aussi la production publicitaire au Québec, qui est un volet particulièrement important de notre patrimoine culturel, rappelle la présidente de l’A2C. Elle va également contribuer à la garder en bonne santé, notamment en facilitant l’accès aux productions d’ici et en matière de tarifs. « L’idée est que l’entente soit compétitive avec celle du Canada anglais, ce qui nous place en bonne position pour attirer non seulement des projets publicitaires dans la province, mais aussi ailleurs au Canada. »
Une entente qui est vue comme complexe et ardue représente nécessairement un frein, ajoute Patrick Hotte. « On a donc voulu établir des principes de bases plus agiles qui permettent de s’ouvrir à de nouvelles opportunités, certaines qui n’étaient même pas considérées avant. Notamment un projet-pilote, qui ajoute un tarif « production à petit budget ». L’entente a aussi cet objectif d’appuyer la créativité, de permettre aux campagnes d’avoir plus d’impact et de fonctionner à leur plein potentiel, peu importe le type de marché. »
Des formations déjà débutées continueront d’être offertes aux professionnel·les de l’industrie qui souhaitent obtenir plus de détails sur la nouvelle entente collective et en apprendre davantage sur les changements adoptés.
Patrick Hotte et Dominique Villeneuve