L’univers du travail évolue rapidement et les professionnel·les des ressources humaines doivent s’adapter plus rapidement que jamais aux réalités changeantes qui touchent les organisations. Qu’elles souhaitent faire face à la pénurie de talents actuelle ou bien favoriser la rétention, les entreprises gagnent à s’inspirer des grandes tendances en matière de RH pour adapter au mieux leurs pratiques. Que doivent-elles surveiller plus particulièrement cette année ?

D’année en année, les experts en ressources humaines dressent un portrait des tendances qui marqueront le monde du travail pour aider gestionnaires et employeurs à mieux cerner les enjeux d’importance qui les toucheront. Bien sûr, on ne parle pas ici de prédictions farfelues issues d’un tirage au tarot, mais bien d’études et d’analyses qui permettent d’envisager certains postulats. «On regarde beaucoup les sondages. On va aussi sonder nos membres, leur demander quels sont leurs besoins et leurs préoccupations du moment. On analyse également l’actualité, ce qui se développe, et on fait appel aux observations de certains scientifiques. Tout ça mis ensemble nous permet d’isoler de manière plus précise les priorités à venir», explique Marie-Ève Girard, représentante de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA).
Suite à cette cueillette exhaustive d’informations, les grandes lignes des tendances qui seront les plus présentes se dessinent. «Ces évaluations nous permettent aussi de pointer les compétences et les connaissances que les professionnel·les en RH aimeraient développer», ajoute-t-elle.
Marie-Ève Girard, représentante de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA)
Un élan de continuité plus que de nouveautés
En discutant avec Marie-Ève Girard, on constate que 2024 ne prendra pas un virage à 360 degrés en matière de tendances RH. Le développement des compétences, par exemple, cette démarche d’apprentissage et d’amélioration des pratiques professionnelles qui permet de faire émerger de nouvelles idées et de nouveaux projets dans les organisations, est toujours d’actualité cette année, selon l’experte. «Une grande tendance de 2024, qui est dans la même lignée que ce qu’on a pu voir par le passé, mais qui demeure toujours une priorité dans toutes les organisations, c’est l’instauration d’une culture d’apprentissage pour devenir une entreprise "apprenante". Ce qui signifie, en d’autres termes, apprendre à continuellement apprendre. Les entreprises peuvent offrir des opportunités d’apprentissage aux talents et encourager l’exploration. Ça permet une croissance des gens en poste en continu et non seulement sporadique.»
Même s’il ne s’agit pas d’une nouveauté spectaculaire, il n’en demeure pas moins qu’il reste important de souligner la pertinence de la notion de «soft skills», une tendance qui sera également toujours présente en cette nouvelle année. Ce terme, qu’on pourrait traduire par «compétences et qualités comportementales et interpersonnelles», s’est imposé dans le vocabulaire RH il y a déjà quelque temps, plus particulièrement utilisé pour désigner les aptitudes des candidats qui ne relèvent pas de leur parcours académique ou professionnel. «Oui, il y a l’expérience, le savoir-faire, mais le savoir-être est aujourd’hui plus important que jamais pour bâtir des relations de travail saines et ouvertes, surtout dans l’ère dans laquelle nous sommes», précise Marie-Ève Girard.
La spécialiste rappelle qu’il n’est pas uniquement primordial de prendre en compte les «softs skills» chez les futur·es ou les collaborateur·ices, mais bien d’encourager leur mise en valeur dans tous les paliers de l’organisation. «Si on pense au choix des gestionnaires, par exemple, miser davantage sur les compétences humaines peut être bénéfique pour l’entreprise. Dans les dernières années, on a vu beaucoup de situations où on avait considéré plutôt l’expertise et la spécialité dans le choix d’un patron, une façon assez traditionnelle de procéder, mais on doit aussi aujourd’hui prendre en compte la capacité d’un gestionnaire à bien communiquer, soutenir et accompagner son équipe.»
Marie-Ève Girard ajoute que sans surprise, la conciliation travail et vie personnelle est toujours en tête de liste des priorités chez les travailleur·euses. «Et je pense aussi à des environnements de travail sains, flexibles et hybrides. C’est certain que ce sont des éléments qui améliorent le bien-être et l’engagement des équipes, donc ça demeure toujours important d’année en année.»
Pleins feux sur les psychosociaux
Les risques psychosociaux dans les organisations représentent une donnée sensible qui, cette année, risque de monter les échelons dans le palmarès des bonnes pratiques RH à adopter. Bien que le discours sur l’importance d’une bonne santé mentale chez le personnel ait grandement évolué dans les dernières années, reste que l’adoption de mesures prises en amont pour détecter d’éventuels problèmes psychologiques ne représente pas encore la norme dans les organisations, croit la représentante du CRHA.
«Je pense que les organisations pourraient concentrer davantage leurs efforts dans les prochains temps sur la détection des risques psychosociaux chez les employé·es, notamment en mettant en vigueur des plans de protection qui pourraient diminuer les effets psychologiques des incidents sur les milieux de travail. Ça permet de démontrer aux gens qu’on tient à eux et qu’on souhaite qu’ils soient bien et en bonne santé, ce qui est essentiel dans toute démarche en RH», conclut-elle.