Pareil pas pareil
Tout d’abord, identifions ces jeunes générations. L’une est née entre 1981 et 1996 (génération Y), l’autre est née après 1997 (génération Z). L’une a grandi avec la technologie et manie les outils numériques de main de maître, l’autre a été plongée dedans et jongle habilement avec le flux constant d’informations instantané. Les milléniaux sont déjà sur le marché du travail depuis un bail, alors que la cohorte de la «génération lockdown» vient d’entamer sa carrière depuis peu ou est encore sur les bancs d’école. Selon un rapport de la BDC, les trois quarts de la main-d’œuvre en 2030 seront composés des milléniaux et de la génération qui les suit. La pandémie aura permis à de plus en plus de gens à remettre en question leurs façons de travailler et de revoir leurs priorités. En d’autres termes, vivez-vous pour travailler ? Ou vice versa ? Les jeunes générations, elles, sont plus enclines à travailler pour vivre. À quelques différences près. Et elles sont plus enclines à vouloir travailler pour des organisations qui rejoignent leurs idéologies. Quitte à quitter.
Une ère post-pandémique
Si plusieurs stipulent qu’il faut des incitatifs distinctifs pour attirer la génération Z versus la génération Y, Alexandre Simon, recruteur au Grenier aux talents, estime qu’on doit être juste. «On ne peut distinguer les besoins de l’une ou de l’autre de ces générations. En tant qu’employeur, ce que l’on propose à une génération, on doit l’offrir à l’autre aussi, dit-il. Mais, disons qu’aujourd’hui, ce que proposent les employeurs a été développé “grâce” à la COVID parce qu’il y avait un besoin de travailleur·euses. Et qui est arrivé sur le marché à ce moment-là ? La génération Z. Par conséquent, les pratiques de recrutement et de rétention ont dû être adaptées pour l’intégralité du marché, et répondre aux besoins changeants, et ils y ont vu l’intérêt de cibler les gen Z.» Au top de la liste des perks recherchés chez les gen Z et les milléniaux est la flexibilité du lieu de travail et de l’horaire. Ce n’est même pas une option, c’est une exigence chère à ces deux générations. D’autres objectifs communs ? Le développement des compétences, l’atteinte de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, ainsi que la quête d’une carrière enrichissante. Alexandre fait remarquer que la demande en mentorat est fréquente. «Je crois que pour ces générations, l’aspect mentorat est particulièrement important. Ces jeunes professionnel·les, fraîchement intégré·es sur le marché du travail, cherchent souvent des mentors. Il·elles expriment le souhait d’avoir quelqu’un au sein de leur équipe capable de les guider, de partager son expérience. Cette approche joue un rôle significatif dans la rétention des talents, car elle les incite à rester et à s’engager davantage dans l’entreprise, en leur offrant un soutien pour leur développement professionnel.»
Gagne-pain et fidélité
Malgré toutes les discussions autour des avantages, des incitatifs et des perks pour fidéliser les talents, le salaire reste le pivot incontournable de la rétention, et ce, quel que soit l’âge. Alexandre Simon est d’avis que le salaire demeure «le gros du sujet» en recrutement. D’après l’étude Jeunesse 2023 de Léger, 15 % des jeunes Canadien·nes ont l’intention de quitter leur emploi au cours de la prochaine année. Cette proportion augmente à près du quart (22 %) auprès des membres de la génération Z, alors qu’elle diminue à 11 % chez les milléniaux. Il·elles le feront surtout pour des raisons salariales — à 47 % chez les gen Z, et à 53 % chez les milléniaux. Toutefois, le simulateur du marché de l’emploi RH démontre qu’une combinaison optimale des conditions d’emploi (vacances, avantages sociaux, horaires, lieu de travail et conditions indirectes) peut attirer ou retenir les jeunes travailleur·ses. Comment fait-on pour les retenir alors ? Outre ces incitatifs, Alexandre croit fortement que la fidélité envers l’équipe — plus qu’envers l’employeur — y est pour quelque chose. D’après le recruteur, l’appartenance à une équipe revêt une importance capitale, voire un des atouts numéro un pour garder les salarié·es. Pour preuve, il a eu nombre de témoignages de gens qui restaient en place en raison de l’affection qu’il·elles ressentent pour leur équipe et leur chef·fe d’équipe, notamment. «Le fait d’avoir des noyaux très durs et des équipes très soudées au sein des compagnies contribue à la rétention», partage-t-il. Mais comment développer une chimie et des affinités au sein des équipes ? L’employeur a-t-il vraiment un contrôle sur ce qui semble aléatoire ? Alexandre nous dit que l’employeur peut tout à fait influencer la chimie des équipes en allouant un budget pour le team building par exemple, en déterminant la fréquence des rencontres des salarié·es en présentiel, et bien sûr en contrôlant son recrutement, c’est-à-dire ne pas se tromper sur la personnalité des gens lors de l’embauche.
Agents de changements
Qu’il s’agisse de la génération Z ou des milléniaux, les nouvelles générations manifestent une confiance fragile en l’avenir d’après l’étude Jeunesse de Léger. Même si la vie a repris son cours après la pandémie, l’incertitude économique, l’augmentation des prix dans plusieurs secteurs et les bouleversements climatiques sont au cœur de leurs préoccupations. De sorte que les organisations devront trouver «le ton adéquat pour s’adresser à la génération Z et aux milléniaux». Pour ces générations axées sur les valeurs, l’incapacité à susciter des changements sur les questions sociales a le potentiel de défaire les efforts de recrutement et de rétention. Selon un rapport de Deloitte, les gen Z et les milléniaux ont des attentes élevées envers les entreprises en matière d’impact social — attentes qui ne sont pas toujours satisfaites. Respectivement 39 % et 34 % ont rejeté des employeurs parce qu’ils ne correspondaient pas à leurs valeurs. Comme l’évoque Alexandre, il faut se demander dans quelle mesure les projets actuels de son entreprise résonnent avec les employé·es et est-ce pour des secteurs qui suscitent l’inspiration, est-ce des missions alignées sur leurs valeurs ? Avec des similitudes et des différenciations propres de leur époque, tant les gen Z et les milléniaux sont des agents de changement qui contribuent à façonner l’avenir du travail. Les organisations qui sauront les rejoindre bénéficieront des avantages d’une main-d’œuvre hautement engagée… jusqu’à l’arrivée de la gen Alpha aux portes du marché du travail.
Milléniaux
- Motivé·es par : la réactivité, une expérience professionnelle unique
- Style de communication : messages instantanés, textos, courriels
- Vision du monde : à la recherche de défis, de croissance, de développement, d’une vie professionnelle amusante et d’un équilibre travail-vie personnelle, susceptible de quitter une organisation si il·elle n’aime pas le changement
- Les employeurs devraient : apprendre à les connaître personnellement, gérer en fonction des résultats, être flexibles quant à leur horaire et à leurs affectations de travail, fournir une rétroaction immédiate
Génération Z
- Motivé·es par : la diversité, la personnalisation, l’individualité, la créativité
- Style de communication : messages instantanés, textos, réseaux sociaux
- Vision du monde : s’identifient comme accro aux appareils numériques, valorisent l’indépendance et l’individualité, préfèrent travailler avec des gestionnaires milléniaux, des collègues innovants et les nouvelles technologies
- Les employeurs devraient : offrir des opportunités de travailler sur plusieurs projets en même temps, assurer un équilibre travail-vie personnelle, leur permettre d’être autonomes et indépendant·es
Source : PurdueGlobal