La pénurie de main-d’œuvre actuelle et la difficulté de recrutement qui en découle ne sont pas de nouvelles réalités, mais certaines entreprises peinent toujours à mettre en place une stratégie efficace pour non seulement attirer les meilleurs talents, mais aussi les garder. Quelle peut être la solution pour ces organisations ? Celle d’arriver à décloisonner leur canal communicationnel pour mieux partager les forces de leur marque employeur.

Présidente-fondatrice de l’agence dada et conférencière spécialisée en communications internes et marque employeur, Manon Goudreault s’intéresse depuis un bon moment au lien intrinsèque qui unit l’expérience employé, l’expérience client et l’expérience citoyenne corporative en entreprise. Selon la gestionnaire, l’arrimage de ces trois expériences, qu’elle appelle «la réconciliation», permet non seulement à une entreprise d’être plus performante, mais donne aussi l’occasion à sa marque employeur d’être unifiée et mieux assimilée par les différents départements d’une organisation. Une stratégie gagnante qui ouvre la voie à un recrutement beaucoup plus efficace et donc, à un service client bonifié. «À l’heure actuelle, il y a plus de sorties que d’entrées de travailleur·euses sur le marché du travail. Et ça devrait prendre au moins une quinzaine d’années avant que la situation se résorbe. Dans cette situation, il est plus difficile pour les entreprises de répondre adéquatement aux besoins de leurs clients, et il peut y avoir un impact sur la qualité des expériences qu’on leur propose. Les organisations doivent donc travailler sur la définition, mais aussi la communication de leur marque employeur, et pas seulement à des fins d’attraction de talents, mais aussi dans un but de rétention et de mobilisation.»
Bien que la notion de marque employeur ait grandement gagné en popularité face aux défis actuels, elle est encore souvent confondue avec celle de la campagne de recrutement, ajoute Manon Goudreault. «La marque employeur est connectée sur la culture de l’entreprise, sur sa mission, sa vision et ses comportements. Actuellement, beaucoup d’organisations peinent à embaucher, car elles mettent en place des stratégies de recrutement à court terme. Mais par la suite, lorsque le talent arrive dans l’entreprise, ce qu’on lui a vendu pendant la campagne de recrutement n’est pas ce qu’il va retrouver dans l’expérience vécue. »
Manon Goudreault
Les conséquences d’une marque employeur en silo
Pour d’autres organisations, le problème réside dans une fragmentation évidente entre les stratégies RH, les démarches marketing et les communications diffusées. Une culture d’entreprise déployée «en silo», donc de manière cloisonnée et non collaborative. «On parle d’offensives complètement séparées du reste de l’organisation. Par exemple, les ressources humaines vont gérer la marque employeur et l’expérience talent, le marketing va s’occuper de la marque et de l’expérience consommateur et les communications vont communiquer sur la marque et l’expérience corporative citoyenne. On retrouve donc beaucoup de gens différents qui racontent des histoires différentes, avec des sens différents, au sein d’une même entreprise. Cette absence de réconciliation dans les messages peut donc créer une incohérence dans l’image de l’organisation, dans sa réputation, impacter le recrutement et l’impact.»
Avec cette absence d’orientation et cette confusion communicationnelle, le risque est donc d’augmenter notamment le cynisme non seulement des employé·es, mais aussi celui des clients et même des citoyen·nes, à l’égard des organisations, croit la présidente de l’Agence dada.
Réflexion, transparence et engagement pour plus d’efficacité
La solution pour les entreprises ? Réfléchir à une stratégie communicationnelle comme «un tout», en déployant une marque employeur concertée, engageante, mais aussi transparente, qui montre réellement ce qu’elle a dans le cœur, en toute authenticité. «Il faut aussi mettre en place une cohérence dans les messages véhiculés, établir des ponts entre les unités de l’entreprise pour avoir un langage et une compréhension qui sont communs, ajoute la gestionnaire. Ça peut être de fusionner des fonctions dans l’organisation, comme celles des communications et des RH, mais aussi de définir les priorités stratégiques.»
Les résultats du baromètre de confiance Edelman 2023 sont équivoques, la notion de responsabilité sociale des entreprises constitue aussi un volet important. Les Canadien·nes veulent savoir que les entreprises s’impliquent dans la société, notamment au niveau des enjeux liés aux changements climatiques et à la discrimination. Leur engagement peut changer la donne dans le champ de bataille du recrutement.
«Les employé·es, les client·es, ce sont aussi des humains, des citoyen·nes. La société réclame une implication des entreprises qui n’est pas artificielle, et leur participation dans l’élaboration de solutions collectives. Donc, les organisations ont tout à gagner à bien réfléchir à la nature de leur marque employeur, et à comment elles souhaitent s’impliquer, pour ensuite le communiquer avec cohérence pour mieux rejoindre les talents», conclut Manon Goudreault.