Née d’une volonté d’approfondir la compréhension de l’impact de l’olfaction en termes de bien-être, Stimulation Déjà Vu, une entreprise d’ici, a évolué vers l’industrie du tourisme et de la culture. Si bien qu’elle a signé l’identité olfactive de Marseille. Sa fondatrice, Audrey Bernard, nous fait voyager.
Gabrielle Ghezzi, Gestionnaire de projet - Anthropologie, et Audrey Bernard, Fondatrice
Crédit photo : Donald Robitaille
Entre créativité et science
À ses balbutiements, l’agence imaginée par Audrey Bernard a travaillé de près avec un docteur en neurosciences cognitives, une sommité dans son domaine — le Dr Johannes Frasnelli. «L’idée était de mesurer l’impact de l’olfaction quant au bien-être avec de l’observation, mais on a réalisé qu’il y avait des limites avec les méthodes traditionnelles, dit d’entrée de jeu Audrey. C’est là qu’on s’est intéressé à utiliser la biométrie pour l’adapter à l’olfaction afin d’aller mesurer les émotions.» Puis, de fil en aiguille, ou d’un arôme à un autre, l’agence a atterri dans l’industrie du tourisme. Et puis… le nom Stimulation Déjà Vu, cette impression d’avoir déjà vécu quelque chose, comportait déjà un aspect scientifique, estime l’entrepreneure. La touche scientifique ne vient pas brimer le côté créatif, loin de là. « On n’enlève pas la créativité, on la guide. Ça nous permet de mieux avancer. L’odorat est très perceptuel, qui est relié à nos facteurs générationnels, culturels, personnels. La data vient nous donner une meilleure idée de la réaction suscitée par la stimulation olfactive. Veut-on une expérience émotionnelle universelle parce qu’on cible des touristes internationaux ou veut-on séduire des touristes français? De là, il y a plein de petites nuances qu’on peut travailler », évoque-t-elle, en faisant référence au processus de création unique de la boîte, qui implique anthropologie, data olfactive, design sensoriel, expert·es marketing et parfumeur·euses.
Voyager par le nez
La capacité de transporter une personne par l’odorat, au-delà d’une image, est puissante. Rien de tel que votre fin nez pour vous faire voyager. Prenons Marseille par exemple. Si on vous parle d’un de ses quartiers emblématiques comme Le Panier, qu’on vous dépeint l’accent coloré et chantant de ses habitant·es, ou qu’on vous parle des Calanques, il y a fort à parier que votre imaginaire commence déjà à voyager. Encore mieux si on vous fait humer la destination. «Si je vous fais sentir Marseille avant de visiter, c’est tout un univers émotionnel qui se construit. C’est un nouveau souvenir, une nouvelle mémoire olfactive qu’on crée», détaille Audrey. Voyez-vous, Stimulation Déjà Vu a la capacité de créer un souvenir en devenir par un simple effluve. «L’odorat est très puissant, puisqu’il est connecté au centre émotionnel. Les 5 premières secondes sont purement de l’émotion. C’est une nouvelle sorte de mémoire qu’on va venir accrocher pour donner envie aux gens d’aller visiter une destination grâce à l’univers olfactif et sensoriel qu’on crée. Et une fois qu’on est sur le lieu, si on a bien effectué notre travail (RIRES), ça vient réactiver et amplifier ce souvenir-là pour l’ancrer dans la mémoire.»
À la source
Comment une entreprise québécoise est allée jusqu’à signer l’identité olfactive de la cité phocéenne? Tout a commencé grâce à MT Lab, un incubateur dédié au tourisme, à la culture et au divertissement, qui met en relation entreprises innovantes et clients, ce qui a permis à Stimulation Déjà Vu de signer le narratif olfactif du territoire québécois pour l’Alliance de l’industrie touristique du Québec. «Il y a eu un fit très fort parce que tout ce qui est souvenir, destination, voyage, passe par “sentir”. On vient raconter, amplifier, projeter. C’est là que notre connexion avec MT Lab s’est créée.» Puisque l’industrie touristique s’apparente à une famille, MT Lab, qui avait beaucoup de réseaux en France aussi, les a présentés à Stimulation Déjà Vu. « On a été accueilli et aidé à faire notre développement d’affaires. On continue à faire des projets sur le territoire français, car il n’y a pas de barrière de langue. Sur le plan culturel, c’est très intéressant et les territoires sont très riches là-bas. On se développe un peu plus en Europe maintenant. »
Le marketing olfactif, c’est vaste. Mais Stimulation Déjà Vu va au-delà d’un parfum diffusé pour vous faire acheter un produit par exemple. «Quand on travaille à faire découvrir des lieux et des destinations, on est beaucoup plus dans la naturalité et l’émotion recherchée», soutient Audrey. De ce fait, le choix d’aller en Provence s’est naturellement manifesté — pour plusieurs raisons, mais aussi pour les matières premières. Pour Stimulation Déjà Vu, développer des créations sur mesure était primordial. «En ayant une filiale dans le sud de la France, on fait partie d’un regroupement qui travaille de nouvelles méthodes de chimie verte, tout ce qui est extraction de matière première. On s’inspire beaucoup de ces méthodes de production pour améliorer la qualité de nos produits et de faire notre part pour l’environnement.»
Expérience sensorielle de destination
Là où il y a une destination, Stimulation Déjà Vu y sera. «Dès qu’on accueille des gens, et dès qu’on peut raconter une histoire, c’est un lieu. Le Palais des congrès de Montréal est une destination pour nous», dit la fondatrice. Son entreprise a eu l’opportunité de développer le parcours multisensoriel de la première Vitrine d’innovations en tourisme du MT Lab en collaboration avec le Palais. Ouverte à l’année dans la galerie marchande et lancée depuis peu, la Vitrine permet de voir, sentir, entendre, toucher et goûter Montréal par ses quartiers au fil de saisons. Une jolie façon de positionner la ville comme plaque tournante de l’innovation auprès des congressistes internationaux que des touristes et des citoyen·nes montréalais·es. «L’expérience qu’on a eue de développer par ce parcours des cinq sens a été révélateur pour nous, s’enthousiasme Audrey. On a notre niche, mais on nous demande de plus en plus d’accompagner et de soutenir une expérience par d’autres sens. On a conceptualisé et mis en œuvre ce parcours en plus de développer le volet olfactif et on a collaboré avec d’autres entreprises pour d’autres innovations.» Ce type de projet réunissant les cinq sens ne sera certes pas le dernier pour cet architecte des sens. «On s’occupe notamment du développement de concepts destinations, de l’analyse et du design sensoriel, du volet olfaction, etc. On crée cette partie à l’interne, et quand on s’étend sur les cinq sens, c’est là qu’on travaille en collaboration avec de belles entreprises innovantes. On s’assure que tout le monde brille aussi.» Petite équipe aux grands projets, Stimulation Déjà Vu a, en plus de signer le parcours 5 sens, 4 quartiers, 1 ville et l’identité olfactive de Marseille, signé le narratif olfactif de Vaucluse en Provence, créé une œuvre olfactive tipi avec l’artiste Jacques Newashish et le Musée de la Civilisation à Québec. Un projet qui a mis l’agence sur la mappe ? Le fameux coffret des odeurs de la métropole avec Tourisme Montréal. À surveiller cet été : le circuit olfactif du Village Val-Jalbert pour se replonger dans les années 20 et l’identité culinaire québécoise, Eau’dorat: Le nez sous l’eau, pour découvrir l’écosystème marin à l’Aquarium du Québec, Musée Belgique - SparkOH!: vivez des émotions scientifiquement prouvées et enfin, le Déploiement Déjà vu en juillet prochain.
Fait à noter, toutes les expériences sont majoritairement activées par les visiteur·teuses. «Plus il·elles sont impliqué·es dans l’expérience, plus l’impact mémoriel olfactif sera grand», précise Audrey. Par ailleurs, Stimulation Déjà Vu étudie ce phénomène dans ses expériences et prévoit publier une étude sur le sujet en 2024. Architecte des sens, qu’on vous disait !
À sentir.
Lancement de la vitrine en compagnie de la ministre du tourisme Caroline Proulx
Capsule olfactive sur le thème de la forêt Lanaudoise
Structure vélos olfactifs
Vitrine innovation au Palais des congrès