Tout bon requin de la finance vous le confirmera : en affaires, c’est chacun pour soi. It’s a man eat man world. Mais s’il y avait une autre façon de faire les affaires ? Une façon, disons… un peu plus féminine ?
L’amour et la pertinence, c’est le nouveau dada de Manon Goudreault, Andréanne Poitras et Aurélie Pinceloup, toutes trois associées chez Agence dada. Je dis dada pour faire un très peu subtil jeu de mots, mais en fait, c’est bien plus qu’un dada pour ces trois entrepreneures. Ces valeurs sont devenues les éléments-clés du nouveau positionnement de l’agence.
« Lorsque j’ai lancé dada, je faisais surtout de la communication interne. À cette époque, le invertising n’était pas tellement sexy, les agences ne gagnaient pas de prix avec ça », se souvient Manon, présidente et associée de l’agence.
Mais neuf ans plus tard, tout le monde n’en a que pour la marque employeur, le marketing RH. « Les nouvelles générations ne veulent pas qu’un emploi. Ils veulent revenir à la base, ils veulent se sentir bien », m’explique Aurélie, nouvellement associée chez dada. Attendez... De l’amour ? En affaires ? De quoi faire mourir d’une syncope toute une génération de banquiers.
« En communication interne, tu n’as pas le choix. Il faut que tu comprennes l’intérieur de l’entreprise, son âme. L’amour, c’est donc la base de la communication interne », lance Manon d’un air convaincu. « Quand l’agence d’Andréanne (ex-Stretch Mrk) et dada ont fusionné, on s’est demandé ce qui faisait notre différence. On savait qu’on faisait les choses avec pertinence, mais il y avait un bout de plus à l’équation. On a finalement trouvé, c’était l’amour. On dit souvent que les émotions n’ont pas leur place en affaires, mais nous on en a. Et on n’est pas gênée de le dire ! »
« D’un point de vue plus pragmatique, on a regardé ce que ça voulait dire en termes d’offre de service et d’objectifs », ajoute Andréanne. « Aimer, ça veut aussi dire écouter. Encourager. Rassurer. Conseiller. Challenger au besoin, mais aussi accompagner. On considère nos clients comme nos partenaires et tout est fait avec bienveillance dans le but d’atteindre leurs objectifs. »
L’intelligence émotionnelle en renfort à l’intelligence d’affaires ?
Manon opine du bonnet. « Une autre de nos différences est que l’agence a été fondée et est dirigée par des femmes. Aux États-Unis, il n’y a que 0,1 % d’agences fondées et dirigées par des femmes. Ici au Québec, c’est un peu moins de 10 %. Dans ce monde créé par des Mad Men, les femmes sont souvent perçues comme des iconoclastes. Pourtant, elles font les choses différemment, de par leurs valeurs différentes ».
OK, mais pourquoi se sentir le besoin de faire également briller la pertinence quand a priori, c’est la chose de base à laquelle tout annonceur s’attend ?
« Je lisais récemment un article dans le Harvard Business Review sur l’importance de l’efficience », m’explique Manon. « Avant, les agences proposaient, exécutaient, attendaient la fin de la campagne puis ajustaient. Maintenant, il faut savoir ajuster le tir en cours de route. »
« On profite de la présence dans nos bureaux de Maxa AI, une firme d’intelligence appliquée. Cela nous permet au besoin de compiler et d’analyser les nombreuses données de nos clients puis de faire des liens entre nos actions et leurs résultats », précise Aurélie.
Je me questionne. Ici on parle d’amour. Dans un précédent article, Martin Sansregret de Tam-Tam me parlait de bienveillance. Est-ce dans l’air du temps ce besoin de (ré ?) intégrer des valeurs humaines dans un contexte d’affaires ?
Serait-ce un contre-balancier inconscient à la froideur technologique, au stress du court terme et aux vagues de disruptions ? De l'effort, oui, mais aussi du réconfort, mesdames ?
Aurélie : « Ici, on rit. On a du plaisir. On est heureux. On s’entraide. On donne des conseils à nos clients qui débordent largement de nos mandats. » Andréanne ajoute : « On a des employés qui viennent de la Colombie, du Mexique, du Salvador, de la France, du Madagascar. Ça l’amène une diversité de points de vue intéressante. » « Ça fait partie de nos valeurs comme femmes entrepreneures », conclut Manon.
Donc beubye les gars ?
« Pas du tout ! On vient d’ailleurs d’en engager un ! » me lance fièrement Manon, alors que je lui réponds par un « Aaaarrkkkeeeu! » bien senti, faisant s’esclaffer nos trois dirigeantes.
« Il s’agit de Jean-Sébastien Granger qui nous vient d’Archipel et qui agira comme vice-président stratégie et développement », m’explique Manon, me précisant qu’à court terme, il n’est pas associé.
Je comprends ! Vous allez analyser sa pertinence, et après, vous lui donnerez de l’amour ? Les trois femmes me répondent à l’unisson : « On sait qu’on l’aime déjà !!! »
Ces femmes qui aiment trop ? Ou plutôt, y était pas trop tôt :)
Aurélie Pinceloup
Manon Goudreault
Andréanne Poitras
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