Présidente de Touché !, Karine Courtemanche est la seule Québécoise à siéger au sein du jury Média du Festival international de la créativité de Cannes, qui récompense l’excellence publicitaire internationale. Jointe par téléphone après 4 jours (de plus de 10 heures !) de délibération, la publicitaire profitait enfin du soleil cannois avec plusieurs de ses collègues d’Omnicom Media Group. On discute tendance, inclusion, et culture publicitaire.

Omnicom
Omnicom Media Group à Cannes

Lors de cette 66e édition du concours, plusieurs thèmes en sont ressortis. Karine a remarqué que les cas gagnants ne sont pas nécessairement ceux qui suivent les tendances de l’industrie, mais plutôt lorsque la « ligne entre le média et la création n’existe plus ». Ce sont des exemples de collaboration exceptionnelle où le message devient le médium, et vice-versa. « Ce sont toujours des cas extrêmement bien intégrés qui ont gagné – on ne sait pas si c’est l’agence média ou de création qui soumet le cas », raconte Courtemanche. Toujours dans l’esprit de collaboration, on assiste également à des partenariats entre grandes marques et petits annonceurs, qui jouissent d’une visibilité grâce à ces dernières. « On voyait ça notamment dans les domaines bancaires, de télécommunications ou encore de l’automobile. Des grandes marques qui donnent un push aux petits entrepreneurs. »

Bien qu’il y eût nombre de cas qui mettaient de l’avant de nouveaux médiums, Karine trouvait encourageant l’exploitation très créative des médias dits traditionnels. « C’est un message positif pour l’industrie, puisqu’on peut encore réinventer le print, la radio et autres points de contacts. On n’est pas obligé d’être en évolution technologique pour être mis de l’avant et gagner à Cannes. »

Autre thème récurrent, l’utilisation du data, qui a été utilisée dans à peu près tous les cas soumis. « On voyait beaucoup d’intégration du data dans l’ensemble des médias. Comme juge, on s’est donné la responsabilité de s’assurer qu’une utilisation respectueuse du data envers les consommateurs a été faite. » C’est une ligne que le jury a tracée très rapidement en début de processus. 

Cette année encore, les campagnes surfaient sur l’équité des genres, l’inclusion et autres causes. « Il y avait beaucoup de campagnes qui supportent des causes et elles performent toujours bien. Cannes, c’est reconnu pour cela. On s’est posé la question, en tant que jury, si l’utilisation de la cause était pertinente et non gratuite. Il doit y avoir un lien réel entre la cause supportée et l’annonceur, pas juste une tactique marketing pour séduire le consommateur ou le jury », souligne Karine.  

« Quelques thèmes revenaient dans la shortlist, mais, à la fin de la journée, le critère #1, c’est toujours la jalousie ! (RIRES). Ce sont les cas qu’on aurait voulu faire nous-mêmes », dit la présidente de Touché!.

Ayant déjà vécu l’expérience sur la Croisette en tant que participante, c’était la première fois que Karine Courtemanche la vivait en tant que membre du jury. Selon ses dires, c’était un « trip professionnel vraiment intense ». Elle précise que c’était beaucoup de travail et de longues journées, mais elle a adoré son expérience et estime qu’elle a eu une chance incroyable.

Devait-elle se préparer en vue de son rôle au sein du jury Média ? Karine mentionne que non, et surtout, elle ne voulait pas arriver avec des idées préconçues. En revanche, pour devenir juge, elle indique qu’il faut une bonne culture publicitaire. Elle écoute et regarde des cas, s’informe sur ce qui se fait à travers le monde. Selon elle, si une personne ne fait pas cette démarche-là, fort à parier qu’elle ne peut pas être juge à l’international. En effet, à Cannes, elle a eu l’occasion de discuter avec le meilleur de l’industrie, et tous possèdent une immense culture publicitaire. « Tout le monde sait qui a gagné quel concours en quelle année ! (RIRES) C’est un peu comme les grands écrivains, qui vont lire, et les grands réalisateurs, qui vont regarder des films. Si tu veux être bon en pub, tu dois en consommer aussi », explique-t-elle. 

A-t-elle eu une certaine pression pour défendre les pièces québécoises ou canadiennes ? « Peut-être est-ce l’éthique qui est plus grande, ou ce n’est qu’un mythe, mais je n’ai pas eu cette pression-là du tout », formule Karine. Qu’en est-il des campagnes ? Est-ce que l’aspect « régional » pouvait être pénalisé versus les campagnes de niveau international ? « Au contraire », mentionne-t-elle. « Avec un format vidéo de deux minutes, il est plus facile d’expliquer un insight local que de parler d’une grande tendance mondiale. » Elle a d’ailleurs vu de petites campagnes venant tout droit de Chine, Hongrie ou encore Brésil, se retrouver dans la shortlist, alors qu’une seule exécution dite média globale l’était.  

Questionnée au sujet du regroupement des Lionnes, qui lutte pour la protection, la défense et la promotion des femmes en publicité, et qui organise présentement une initiative « Off-Cannes », Karine répond que le thème de l’égalité des femmes dans la publicité est récurrent. « Intensément mis de l’avant, avec ou sans les Lionnes. Partout, partout, partout ! », précise-t-elle.

Et c’est tant mieux ainsi.

Pour tout connaître sur le Festival international de la créativité de Cannes, qui se déroule jusqu’au 21 juin, c’est ici.


Radio-Canada (PHD Montréal) en shortlist Media (Media/Entertainment) pour l'opération Fighting Fake News in Real-Time.