Le paysage de la diffusion sportive au Canada connaît une transformation majeure. Les plateformes de streaming empiètent rapidement sur le territoire de la télévision traditionnelle, et l’arrivée d’Amazon dans la diffusion de la LNH et la NBA a marqué un changement significatif. Alors que l’entente de 12 ans et 5 milliards de dollars de Rogers pour la LNH arrive à échéance en 2026, l’avenir de la diffusion du hockey pour les Canadiens reste incertain. Ce changement profitera-t-il aux amateurs ou créera-t-il de nouvelles barrières ? Et quelles seront les conséquences pour les annonceurs qui ont longtemps compté sur les audiences des diffuseurs traditionnels ?
Expérience des fans finis vs. les spectateurs occasionnels
Un récent exemple de migration vers le streaming est la MLS, qui a signé une entente exclusive avec Apple TV pour la diffusion mondiale. Si les passionnés en bénéficient grâce à un meilleur accès et moins de restrictions géographiques, les spectateurs occasionnels se heurtent à une barrière financière qui pourrait freiner la croissance de la ligue. Une tendance similaire pourrait-elle s’installer dans le hockey canadien ?
Contrairement à la MLS, le hockey occupe une place profondément enracinée dans la culture canadienne et a toujours été largement accessible à la télévision. Avec des droits de diffusion fragmentés entre Bell, Rogers, Québecor et Amazon, les amateurs de hockey doivent désormais jongler entre plusieurs plateformes. Bien que cette évolution puisse améliorer la qualité des productions, elle risque de rendre l’expérience plus compliquée et coûteuse pour ceux qui ne veulent pas multiplier les abonnements.
On met également davantage l’accent sur les intérêts et les valeurs au-delà du jeu lui-même, alors que les amateurs de sport consomment le contenu de manière différente. Le contenu sportif non diffusé en direct devient une nouvelle porte d’entrée. De nouveaux fans apparaissent grâce à ces nouvelles façons de suivre le sport (ex. la série Drive to Survive sur Netflix) : c’est plus accessible, plus divertissant et plus axé sur les personnalités.
Ce changement est motivé par les désirs, besoins et préférences de la génération Z — une cohorte où seulement 23 % des jeunes aux États-Unis se considèrent comme des amateurs de sport (comparé à 42 % des Millennials). Il sera donc essentiel de rejoindre les fans modernes sur les plateformes où ils passent du temps. On peut s’attendre à l’émergence de nouveaux formats narratifs, permettant aux amateurs de rester engagés encore plus longtemps (Source : WARC, Sports marketing trends in 2024).
La portée de la télévision traditionnelle est en déclin
La télévision traditionnelle a toujours permis aux annonceurs d’atteindre un vaste public. C’est encore le cas aujourd’hui. Une seule campagne nationale pouvait toucher des millions de téléspectateurs, allant des amateurs fidèles aux spectateurs occasionnels, offrant ainsi une exposition inestimable aux marques.
Toutefois, avec le passage au streaming, l’audience devient plus segmentée. Le modèle évolue d’une exposition de masse vers une publicité hyperciblée, où les marques peuvent adapter leurs campagnes à des segments démographiques précis. Si cela permet une meilleure précision, cela entraîne aussi une perte de portée — les annonceurs ne pourront plus facilement rejoindre les vastes audiences occasionnelles qu’offrait la télévision.
Quel impact pour les annonceurs canadiens ?
Pour les annonceurs, cette nouvelle réalité comporte à la fois des défis et des opportunités. D’un côté, des services comme Amazon et Apple TV offrent des outils avancés de ciblage, permettant aux marques de rejoindre un public engagé et fortuné, ce qui pourrait améliorer les taux de conversion et l’efficacité des campagnes. Mais cette précision a un prix — les CPM risquent d’augmenter en raison de la compétition pour ces audiences de niche.
De plus, l’abandon progressif de la télévision traditionnelle signifie que les spectateurs occasionnels — qui regardaient les matchs passivement et étaient exposés aux publicités — risquent de disparaître du paysage médiatique. Cela pourrait avoir un impact majeur sur les campagnes axées sur la notoriété de marque. Les annonceurs canadiens devront repenser leurs stratégies en misant davantage sur la publicité numérique et les réseaux sociaux pour compenser la perte de visibilité télévisuelle.
L’avenir de la diffusion sportive
Avec la fin du contrat de Rogers et Québecor pour la LNH en 2026, la concurrence pour les droits de diffusion s’intensifiera. L’entrée d’Amazon dans le marché indique que les géants technologiques sont de plus en plus prêts à rivaliser avec les réseaux traditionnels, ce qui pourrait faire grimper les coûts et fragmenter davantage l’accès pour les amateurs de hockey. Si davantage de plateformes sécurisent des droits exclusifs, les spectateurs devront faire des choix difficiles quant aux abonnements à privilégier.
Cette évolution pourrait transformer la diffusion sportive en un produit haut de gamme, accessible principalement à ceux prêts à payer pour des expériences enrichies. Du contenu en coulisses, des options interactives et un accès privilégié aux joueurs pourraient devenir des arguments de différenciation des plateformes de streaming face à la télévision traditionnelle.
Conclusion
L’évolution de la diffusion sportive au Canada reflète une transformation plus large de la consommation médiatique. Si le streaming améliore l’expérience des amateurs dévoués, il risque d’aliéner les spectateurs occasionnels et de réduire la portée globale du sport. Pour les annonceurs, cela signifie s’adapter à un monde où l’exposition de masse n’est plus garantie. Des CPM plus élevés, une publicité plus ciblée et des changements dans les habitudes de visionnement façonneront ce nouveau paysage médiatique.
Alors que le sport en direct continue de migrer vers le streaming, annonceurs et amateurs devront naviguer dans un monde de plus en plus complexe et fragmenté — un monde où le jeu reste le même, mais où la façon de le regarder et de le commercialiser évolue rapidement.