On l’entend de plus en plus, la peur d’être remplacé·e par l’intelligence artificielle (IA) commence à faire du bruit dans nos 5 à 7. C’est l’IA générative (IAG), plus particulièrement qui fait jaser, parce que cette technologie est capable de créer de nouveaux contenus tels que des fichiers audio, des textes, des images et des vidéos. Alors que pour certaines personnes, ce progrès signe la fin de nombreuses professions créatives, aux yeux du fondateur du studio technologique Prologue AI, Jonathan Rouxel, l’IA est au contraire un outil dont il faut savoir tirer profit. «Il ne s’agit pas du tout de remplacer des gens ou leur travail, mais d’utiliser l’IA pour amplifier notre créativité tout en s’inspirant des nouvelles façons qu’elle nous offre d’interagir avec le public.» 

Cette idée de propulser la créativité par l’IAG est partagée par nombre de spécialistes. Comme on peut le lire dans la Harvard Business Review, «une des plus grandes opportunités qu’offre l’IAG aux entreprises et aux gouvernements est d’accroître la créativité humaine et de surmonter les défis liés à la démocratisation de l’innovation.» Encore faut-il savoir quels outils utiliser et surtout comment naviguer légalement dans le monde de l’IA.

Des outils IA qui appuient la créativité
L’IA ne se contente pas d’accélérer les processus de production chez Prologue AI ; elle joue un rôle clé dans la stimulation de la créativité au quotidien. Pour Jonathan Rouxel, l’IA est devenue un outil indispensable pour repousser les limites de l’imagination. «Grâce à l'IA, de nouvelles formes d’expression artistique voient le jour, comme l’art génératif ou les films créés entièrement par des intelligences artificielles. Cela élargit le champ des possibles pour les artistes et les entreprises cherchant à se différencier avec des œuvres uniques et innovantes. Pour nous, explique-t-il, l'IA nous permet d’aller au-delà des simples rendus statiques.» En effet, avec des outils comme Midjourney ou Luma AI, son équipe peut rapidement explorer de nouvelles directions visuelles ou créer des expériences immersives qui, auparavant, auraient nécessité des mois de travail. «On peut transformer une idée abstraite en prototype visuel en quelques minutes, ce qui nous donne la liberté de tester plusieurs concepts sans perdre de temps.»

Ce gain de temps ne signifie pas une perte de créativité, bien au contraire. L'IA permet à l’équipe de Prologue AI d'élargir les horizons artistiques et de s'aventurer dans des terrains inexplorés. «On utilise Midjourney par exemple, pour générer des visuels en un clin d’œil. C’est parfait pour tester rapidement différentes idées ou pour créer des moodboards inspirants pour nos client·es.» Jonathan Rouxel mentionne aussi l’utilisation de GPT-4 et de SORA, des outils qui permettent non seulement de rédiger des articles, des scripts, ou des stratégies marketing, mais aussi de traiter des données complexes et de fournir des recommandations créatives. Aux yeux de cet entrepreneur innovant, ces outils IA augmentent les chances d’innover et permettent aux créatif·ves d’élaguer leur quotidien des tâches les plus répétitives.

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«Le plus grand potentiel de l’IA générative n’est pas de remplacer les humains ; il est de les aider dans leurs efforts pour créer des solutions jusqu’ici inimaginables.»
-Harvard Business Review

Optimiser sa vision
Sachant qu’une petite équipe peut désormais rêver grand, grâce en partie à l’IA, on peut croire qu’elle est devenue un catalyseur créatif, rendant possibles des projets autrefois hors de portée, tout en libérant du temps pour approfondir les idées et offrir des expériences interactives et sur mesure à la clientèle. « L'IA nous offre la chance de rester focalisés sur la direction artistique et l'innovation, tandis qu'elle prend en charge les aspects techniques ou répétitifs », dit Jonathan Rouxel, qui explique qu’en pouvant se concentrer sur l’innovation, ses équipes ont plus de temps pour leur créativité. Runway ML, par exemple, les aide à automatiser certaines tâches répétitives en post-production vidéo, ce qui laisse plus de place pour se concentrer sur l’innovation et aux créateur·rices, de créer.

Ce même genre de tâches automatisées est recherché dans un outil spécialisé en modèles 3D chez Prologue AI : Luma AI. L’équipe l’utilise pour faciliter la création de modèles 3D immersifs et interactifs. «Que ce soit pour des vitrines virtuelles ou des environnements numériques, Luma nous permet de concevoir des expériences immersives pour nos client·es, les plaçant à la pointe de la réalité augmentée (AR) et virtuelle (VR)», explique-t-il. Parallèlement, le studio a aussi su trouver l’outil IA optimal pour l’amélioration de ses visuels, Magnific AI. « Que ce soit pour de la photographie, du design graphique, ou des projets artistiques numériques, cet outil nous aide à faire de l’editing en optimisant la qualité des images et en améliorant le rendu final », ajoute enfin Rouxel, qui spécifie que pour mettre au monde une belle et bonne production, ça prend l’humain derrière qui la crée d’abord. «Il n’est donc pas question de remplacer personne, explique-t-il, mais plutôt de savoir utiliser ces outils pour nous donner un gros coup de main pour aller plus vite et explorer une tonne de nouvelles pistes.» 

L’utilisation de l’IA et le respect de la loi
Alors que des marketeurs ou des studios innovants comme Prologue AI adoptent de nouveaux outils IA de manière quotidienne, la question des droits d’auteur et de la sécurité des données doit proportionnellement devenir primordiale dans le quotidien de celles et ceux qui l’utilisent. «C’est évident pour nous que les préoccupations entourant la propriété du contenu, l’utilisation des données protégées, les risques de violation involontaire et les contrats et licences sont présentes», précise Jonathan Rouxel, qui croit que ces aspects nécessitent une vigilance accrue pour protéger les droits, mais aussi pour éviter les litiges.

À ce propos, Caroline Jonnaert, avocate spécialisée en technologies émergentes chez Robic, met en garde contre les pièges potentiels liés à l’utilisation de ces technologies dans la création de contenu. «Le principal défi réside dans la propriété intellectuelle des œuvres générées par l'IA. Qui est le véritable auteur d’un visuel ou d’un texte généré par un algorithme?»

En effet, selon les lois actuelles sur le droit d’auteur, une œuvre doit être le fruit d’un effort créatif humain pour être protégée, ce qui laisse une zone grise pour les créations générées entièrement par des machines. À ce propos, Caroline Jonnaert précise: «Il est impératif que les entreprises qui utilisent ces outils intègrent un processus où les créateur·rices insufflent suffisamment de créativité originale pour que le contenu soit protégé par le droit d'auteur.»

Les préoccupations éthiques s’étendent également à l’utilisation des bases de données pour entraîner ces modèles d’IA et peuvent créer des confusions. «Les algorithmes sont souvent formés sur des œuvres protégées par le droit d’auteur. Cela peut entraîner des violations involontaires si les données sont utilisées sans autorisation», explique-t-elle. Pour éviter de telles situations, elle recommande aux entreprises de veiller à ce que les bases de données utilisées pour entraîner leurs IA soient légales et respectueuses des droits d’auteur.

Transparence et responsabilité des entreprises
En plus des questions de droit d’auteur, la transparence est un autre enjeu préoccupant aux yeux de la loi. Rappelant que le cadre juridique entourant l’IA est encore en construction, l’avocate spécialisée en droit des technologies émergentes chez Robic encourage les entreprises à être transparentes quant à leur utilisation de l’IA, même si la loi ne les oblige pas pour l’instant, afin de prévenir des litiges ou malentendus. Elle insiste également sur l’importance pour les entreprises de se doter de politiques internes claires qui balisent l’usage des technologies d’IA, garantissant une utilisation éthique et respectueuse des droits des tiers. «Les marketeurs doivent être conscient·es des risques liés à l'utilisation de l'IA et prendre les mesures nécessaires pour éviter tout problème juridique futur.»

L’avenir des régulations autour de l’IA
Enfin, la question de l’évolution des lois en matière de propriété intellectuelle se pose. «Les régulations actuelles ne sont pas encore adaptées à ces nouvelles technologies. Nous devons nous attendre à ce que les lois évoluent pour intégrer des règles spécifiques à l’IA» anticipe Jonnaert. En attendant, Jonathan Rouxel et son équipe à Prologue AI continueront de mettre la vigilance à l’honneur. «Mais si j’ai un conseil à donner à celles et ceux qui veulent oser les outils IA, je leur dirais que de jouer la sécurité, c’est étouffer la créativité. Parfois, c’est en sortant des lignes que naissent les plus grandes idées. Il est très possible de rester à l’affût des lois tout en n’oubliant pas que l’innovation se trouve souvent là où on prend des risques.»
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CITATION:  Le principal défi réside dans la propriété intellectuelle des œuvres générées par l'IA. Qui est le véritable auteur d’un visuel ou d’un texte généré par un algorithme ?
-Caroline Jonnaert

Portrait 1

Caroline Jonnaert et Jonathan Rouxel