On ne se le cachera pas, les tendances qui ont marqué 2023 en ont fait l’une des années les plus stimulantes sur le plan de l’innovation technologique, n’en témoigne que la montée fulgurante de l’intelligence artificielle générative (IAG) dans plusieurs domaines de la création.
Il n’y a en effet qu’à se tourner vers Midjourney, ChatGPT (OpenAI) ou LaMDA (Google) pour réaliser l’incroyable potentiel offert par ces modèles: que ce soit par leur capacité à créer du contenu à grande échelle ou sur demande - en un temps record -, les outils actuels démontrent bien l’ampleur de l’impact qu’ils peuvent avoir dans les domaines du marketing, des médias, des communications et de la publicité. En effet, ce que nous révèle le rapport The Pace of Progress, 2024 Media Trends, publié par l’agence, c’est que «tout comme l’internet a révolutionné l’accessibilité au contenu, l’IA générative a le potentiel de faire de même pour la création de contenu destiné aux marques.»
Alors, concrètement, de quel genre de potentiel parlons-nous au juste ?
L’IAG déjà bien implantée dans les pratiques
On peut se demander, avant de crier sur tous les toits que l’IAG va s’implanter en 2024, si elle ne s’est pas déjà immiscée dans les pratiques actuelles. « Ce qu’il faut tout de suite se mettre en tête, c’est que l’IA générative occupe déjà plus de place dans le monde de la rédaction qu’on le pense, indique Alexe Martel, fondatrice de Les mots pour vendre et rédactrice professionnelle. La tendance est déjà bien installée, mais elle va s’amplifier. » Et donc, les habitué·es à l’IAG auront pour ainsi dire une longueur d’avance sur les autres ? « Je pense que les early adopters ont un avantage réel sur leurs collègues qui sont réticent·es à adopter l’IA, explique la consultante en rédaction persuasive, parce que l’IA permet de rédiger plus rapidement du contenu de bonne qualité. »
IAG, copilote de l’idéation
À ce propos, le rapport médias 2024 de dentsu spécifie que « l’IA générative s’installera directement dans le siège du copilote, déclenchant une nouvelle ère de créativité. » Comment penser cette nouvelle relation de travail et surtout, comment l’IAG a-t-elle « le pouvoir de redéfinir la créativité », comme le mentionnent les spécialistes de dentsu ? « En fait, l’IA générative permet d’étendre la boîte à outils des professionnel·les dans le domaine créatif et de devenir un accompagnateur surdoué dans leur quotidien pour l’idéation, explique Sophie Labarre, cheffe des relations clients chez dentsu X. » Donc, un outil de travail, idéal pour démarrer la création de contenu ? Les possibilités s’étendent au-delà de ça, selon l’experte, et vont même jusqu’à aider à régler le fameux problème de la page blanche. «Les équipes peuvent maintenant utiliser l’IA générative pour tester des idées initiales, simplifier le processus de recherche et donc d’accélérer le processus d’inspiration. La rapidité d’accès à autant d’informations fournies par les modèles d’IA générative aura certainement un impact direct sur l’évolution des tendances et poussera la créativité encore plus loin.»
Un impact sur la productivité
L’IA générative aurait donc le potentiel de donner un petit coup de pouce à l’inspiration, mais plus encore. Si l’on se fie aux prédictions du magazine Forbes, «2024 sera l’année où le monde découvrira à quel point l’IA générative peut être puissante et utile», car son utilisation judicieuse a le potentiel de « rendre plus efficaces, plus rapides et plus productif·ves.» Sophie Labarre est d’avis que la technologie de l’IA «permet de libérer les équipes des tâches répétitives et de gagner en efficacité dans les méthodes de travail, afin de produire un meilleur travail, plus facilement.» Autrement dit, les entreprises et les équipes qui confieront à l’IA générative des tâches comme la planification, la recherche ou la structure, auront plus de temps pour «exploiter leurs compétences véritablement humaines, en passant plus de temps à explorer de nouvelles idées».
Sophie Labarre (Dentsu X) et Alexe Martel (Les mots pour vendre) / Crédit : dentsu et Marrie-Eve Larente
Se démarquer dans un monde génératif
Même si l’IAG a le pouvoir d’augmenter la productivité des créateur·rices de contenu en supprimant des obstacles du quotidien à la création, « l’IA générative la démocratise et donne naissance à une nouvelle économie de la création (denstu, rapport médias 2024) » soulevant notamment un problème en matière d’originalité. « Parce que le plus gros défaut de l’IA, explique humblement Alexe Martel, c’est qu’elle n’a pas d’intention. Les modèles comme GPT imitent l’écriture, mais ils ne rédigent pas vraiment. Ils écrivent un mot à la fois, de façon linéaire et oui, robotique. Pas parce que ça manque d’émotion — ils imitent bien l’émotion —, mais parce qu’ils ne savent ce qu’ils écrivent, ni pourquoi ils le font. Pour moi, ce n’est pas tant l’IA qui doit évoluer — la technologie évolue déjà tellement vite qu’on a du mal à s’y adapter assez rapidement — que l’éducation qu’on fait à propos d’elle qui doit devenir une vraie priorité. Je pense qu’une des plus grosses erreurs à faire, ce serait du copier/coller. Mon premier conseil, ce serait de se tenir loin de ce genre de propositions. » Madame Labarre argue en ce sens, elle aussi. « Nous devons utiliser l’IA générative avec vigilance et parcimonie. Notamment, le souci de protection des propriétés intellectuelles demeure un important enjeu. Notre approche pour le moment chez dentsu est de mettre ces outils à la disposition de nos équipes dans des environnements sécurisés pour permettre d’expérimenter et d’accélérer certaines tâches. Comme il y a plusieurs écoles de pensée, celle qu’on préconise aujourd’hui chez dentsu, c’est l’IA + l’humain. L’IA amène de nouvelles façons de faire et nous permet de faire évoluer le produit créatif et d’innover (comme en témoigne le succès de notre campagne Inflation Cookbook basée sur l’IA et lancée en avril 2023). Toutefois, l’IA ne remplace pas l’humain. Son rôle est d’inspirer, supporter et faciliter le développement créatif, et non pas de générer une finalité de l’idéation en soi. »
Toujours de l’intelligence (humaine) en 2024
À en croire les expertes interrogées, l’IA générative est donc un nouvel assistant qui a le potentiel d’augmenter la créativité et la productivité, mais qu’il faut insérer dans les pratiques avec vigilance et parcimonie. «Une des grandes forces de l’IA générative, indique Alexe Martel, c’est sa polyvalence. C’est un outil tellement flexible qu’on peut tous et toutes utiliser de façon différente, en fonction de nos forces et de nos défis. Ce qu’il faut comprendre, c’est que si tu arrives à rédiger un article de blogue en 15‑20 minutes avec l’IA, ça veut dire que ton compétiteur peut le faire lui aussi. Dans ce contexte, ton texte perd toute valeur. Mon souhait, c’est qu’à moyen terme, les entreprises et les médias qui produisent du contenu investissent davantage dans les projets longs, profonds, originaux ou recherchés et reconnaissent la valeur des contenus qui nécessitent un apport humain important — par exemple, les argumentaires nuancés, les reportages, les études de cas, les contenus collaboratifs, etc.» Il a donc de quoi se rassurer: le jugement et l’originalité sont encore du côté humain ! (Pour l’instant ! !)
Qu’est-ce que l’intelligence artificielle générative (IAG) ?
Il s’agit d’une branche de l’intelligence artificielle qui se concentre sur la création de modèles capables de générer de nouveaux contenus, tels que des images, des textes, de la musique ou même des vidéos, qui semblent avoir été créés par des humains. L’IA générative fait référence à des modèles d’apprentissage en profondeur qui peuvent prendre des données brutes – par exemple l’intégralité de Wikipédia ou les œuvres rassemblées de Rembrandt – et «apprendre» à générer des résultats statistiquement probables lorsque vous y êtes invité·e. À un niveau élevé, les modèles génératifs codent une représentation simplifiée de leurs données d’entraînement et s’en inspirent pour créer un nouveau travail similaire, mais pas identique, aux données d’origine.
Source : IBM