Métro Média dénonce l'inaction et l'indifférence de la Ville de Montréal dans le dossier des journaux locaux et alerte sur les conséquences graves d'une possible disparition de la presse locale sur l'île de Montréal. L'annonce se fait dans le cadre de l'entrée en vigueur du règlement municipal interdisant la distribution d'articles publicitaires, dont les journaux, dépliants et feuillets, dès le 17 mai.

«L'inaction de l'administration municipale pousse certains groupes de presse, comme le nôtre, à prendre des décisions crève-cœur dans les prochaines semaines. Pour Métro Média, cela entraînera des coupures importantes au sein de notre salle de rédaction de plus de quarante employé·es, soit ceux et celles qui couvrent l'actualité quotidienne de notre ville et de nos arrondissements. L'apport des journaux locaux montréalais à la vitalité du tissu social et démocratique de notre ville est en péril, dit Andrew Mulé, président et directeur général de Métro Média. Le plus ironique dans toute cette histoire est que le Publisac continuera à être distribué par Postes Canada et les centres de tri seront toujours aussi remplis, ce qui, rappelons-le, était la principale raison qui soutenait la décision de la Ville de Montréal

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Une transformation numérique ambitieuse, mais semée d'embûches
La question de l'abolition du Publisac par la Ville de Montréal a fait surface pour la première fois en juillet 2021. Voyant que cette situation allait avoir un impact majeur sur la distribution des hebdos locaux, les autorités municipales avaient à l'époque pris la décision de créer un groupe de travail, dont Andrew Mulé assurait la présidence. Les recommandations de ce comité, sans pour autant être totalement demeurées lettre morte, n'ont malheureusement pas donné le résultat escompté.

Parallèlement, voyant la fin inévitable de la distribution des journaux par le Publisac, Métro Média a pris la décision d'effectuer une vaste transformation numérique de ses hebdos et de réinventer en quelque sorte l'information de proximité en focalisant uniquement sur Montréal et ses quartiers. «Un plan sur trois ans qui, composé d'un investissement de plus de 3,5 millions de dollars et combiné à des compétences éditoriales, numériques, créatives et innovantes, devait mettre l'information locale au service du citoyen et rassembler les Montréalais autour d'événements et de commerces qui les concernent», précise Andrew Mulé.

Toutefois, l'annonce de la Ville de Montréal en avril 2022, signalant que la distribution du Publisac prenait fin dès le mois de mai 2023 a fait dérailler le plan triennal. Même si Métro Média avait salué la décision, estimant qu'elle était « louable et nécessaire », elle est la cause principale des souffrances de la presse locale. Craignant d'être associés à un mode de distribution qui avait trop mauvaise réputation, certains annonceurs ont déserté les journaux locaux, entraînant ainsi une importante baisse de revenus aussi subite qu'imprévue.

L'édition papier, qui servait à financer la transition numérique, est rapidement devenue non-rentable. Métro Média a été forcée d'abandonner le papier beaucoup plus tôt que prévu.

La presse locale laissée à l'abandon
Le programme d'aide ponctuelle pour les journaux imprimés, annoncé par la Ville de Montréal en octobre dernier, a été salué par le milieu de la presse locale puisqu'il venait compenser cette perte de revenus publicitaires observée peu de temps après l'annonce du Publisac. Or, il ne servait malheureusement pas à assurer la transition vers le numérique. Lors de cette annonce, le responsable du développement économique au comité exécutif de la Ville de Montréal s'était toutefois engagé à un investissement permanent et à long terme dans les journaux de quartier pour hausser leurs revenus.

Malgré de nombreuses démarches auprès de membres du comité exécutif de la Ville de Montréal, ainsi qu'une demande de rencontre d'urgence avec la mairesse Valérie Plante restée sans suite, Métro Média se trouve désormais dans une situation critique. De nombreuses tentatives d'expliquer en quoi les médias locaux numériques peuvent offrir un véhicule novateur pour communiquer avec les citoyen·nes des arrondissements ont échoué et des essais pour sensibiliser les décideurs à migrer des investissements des plateformes numériques mondiales vers les médias d'ici n'ont pas été fructueux. Un engagement fort reconnaissant le réel apport des médias locaux permettrait d'assurer le maintien et la survie de l'ensemble des médias locaux montréalais.

«Le temps s'écoule inexorablement et je constate que la survie des hebdos locaux ne semble pas être une priorité pour les autorités municipales. Nous nous butons à des manières de faire qui ne règlent rien et qui, pire encore, sont encore plus néfastes à la presse locale, affirme Andrew Mulé. Certains arrondissements affirment préférer l'utilisation de plateformes étrangères au détriment d'un média d'ici. L'information locale et ultralocale est pourtant au cœur de notre mission. Mieux que quiconque, nos journalistes sont en mesure de ressentir et de vivre l'effervescence de la vie communautaire, sociale, économique et politique des différents quartiers, et de la transmettre aux citoyens à travers le journal. Mais tout ça risque de disparaître au profit des GAFAM de ce monde ou des "faiseurs de fausses nouvelles" si rien n'est fait à très court terme pour aider la presse locale.» 

Métro Média est également en pourparlers avec les gouvernements provincial et fédéral dans l'espoir de trouver une solution permettant à la presse locale montréalaise et québécoise d'assurer une transition harmonieuse vers de nouveaux modèles d'affaires.

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